Traduit de l’anglais et d’après un article de Peter Kwasniewski publié le 23/08/2021 sur le site https://www.newliturgicalmovement.org/ .
Je me souviens d’avoir entendu il y a quelques années deux affirmations : d’abord que le psaume 42 était récité pendant la procession menant de la sacristie jusqu’à l’autel comme un acte de préparation personnelle, que le Dernier Évangile était proclamé en route pour la sacristie comme un action de grâce personnelle ; et ensuite que c’est le pape Pie V qui, le premier, les a intégrés dans le missel Romain à la place qu’ils occupent désormais. J’ai d’ailleurs moi-même répété à la lettre ces opinions dans une séance de Questions-Réponses après une conférence donnée à Saint-Louis. Un religieux présent lors de cette conférence m’a écrit par la suite une fraternelle correction très polie, et j’ai pensé qu’il serait bénéfique que je partage avec mes lecteurs ce qu’il avait lui-même partagé avec moi -en particulier quand ces derniers temps des personnes qui devraient être mieux informées attribuent souvent à Pie V des actes fantastiques d’originalité.
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« Vous avez dit que le Dernier Évangile et les Prières au bas de l’autel étaient des dévotions antérieures à la réforme de Pie V, et qu’elles étaient récitées en marchant pendant la procession depuis la sacristie et en se rendant à la sacristie. J’ai pensé que vous seriez intéressés de voir des photographies des missels Romains préalables au Concile de Trente qui, en réalité, prescrivent l’état actuel des pratiques dans leurs rubriques. On pense que 1474 est l’année de la première édition du Missale Romanum. La Henry Bradshaw Society a publié en 1899 une édition critique du Missale Romanum de 1474 de Milan. Si le Dernier Évangile n’est pas mentionné dans l’Ordinaire, les prières au bas de l’autel, elles, sont là :
Un Missale Romanum imprimé à Venise en 1501, trois ans avant avant la naissance de Pie V, contient deux sections de rubriques : une introduction au début et un Ordinarium Misse au milieu du tome. Ce Missel inclue à la fois les Prières au bas de l’autel et le Dernier Évangile décrits d’une manière parfaitement conforme au format auquel nous sommes habitués durant les messes en forme extraordinaire aujourd’hui. Puisqu’il ne présente pas de pagination, j’ai inclus un outil de recherche textuelle qui mènera aux pages visées (le scan pourra être téléchargé gratuitement également). Il y a :
-Une première section qui inclue les Prières au bas de l’autel : stans ante infimum gradum altaris (cherchez : letificat iyuentutem)
-L’Ordinarium incluant les Prières au bas de l’autel : cum intrat ad altare (cherchez : facerdos cũ itrat)
-La première section décrit le Dernier Evangile : ad cornu evangelii (cherchez : Initium fancti euangely)
-L’Ordinarium ne mentionne pas un Dernier Evangile après le Placeat (cherchez : tibi laf qua fancta)
On constate que nombre de missels de cette période omettent le Dernier Évangile. Je n’en pas trouvé un seul pour le moment qui omet les Prières au bas de l’autel, dont la forme reste la même dans tous les missels, au moins en ce qui concerne le rite Romain. J’ai également constaté qu’aucun missel ne mentionnait que ces prières devaient être récitées pendant la procession, ce qui signifie que dans l’usage Romain, au moins à l’époque des premiers missels imprimés, la pratique de la récitation de la prière en marchant ne subsistait pas – en supposant qu’elle ait été la norme un jour.
Voici des photographies d’un Missale Romanum imprimé en 1540 : la page de garde, les Prières au bas de l’autel, et le Dernier Évangile :
Un sondage non exhaustif des missels romains primitifs imprimés, numérisés et mis en ligne sur Internet, permet de constater que l’usage du Dernier Évangile (ou de tout ce qui peut survenir après le Placeat) avait tendance à fluctuer jusqu’à l’époque du pape Pie V, dont l’édition du missel a normalisé un certain nombre de choses – et dont c’était précisément l’objet : Pie V voulait publier pour ainsi dire une sorte d’idéal atteignable. On pourrait d’ailleurs en dire autant de la formule de bénédiction finale. Pour autant on ne peut pas dire que Pie V a inventé la pratique actuelle. Outre les éditions de 1501 et de 1540 du Missale Romanum vues précédemment, la pratique précise que l’on connait actuellement dans les messes en forme extraordinaire se retrouve dans certains usages non Romains tels que le Missale Aniciensis de 1543 dans le diocèse du Puy-en-Velay :
-Prières au bas de l’autel : ante altare (chercher : ang)
-Dernier Évangile après Placeat (chercher : erat verbül)
C’est le genre de choses que l’on trouve où que l’on regarde : tous les ingrédients du Missel de Pie V de 1570 étaient déjà pleinement présents dans des éditions antérieures. En fin de compte c’est un missel qui transmet d’une manière très conservatrice, tout en clarifiant et en cristallisant désormais au bénéfice de l’Église universelle, ce qui était habituel pour la Curie Romaine. Contraste frappant s’il en est avec la méthode de son 37ème successeur. »
Corollairement : le missel de 1965 n’apporte aucune solution à nos problèmes. Ce missel de transition marque déjà une corruption de l’ancienne tradition Romaine.
[Cette dernière considération de P. Kwasniewski n’engage pas la rédaction d’Esprit de la liturgie, au sein de laquelle existent diverses opinions au sujet du missel de 1965.]
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