Esprit de la Liturgie

Lex orandi – Lex credendi – Ars celebrandi

Brève histoire du rite romain de la messe (Uwe Michael Lang) — partie IV : Les premières prières eucharistiques, improvisation orale et langage sacré

Suite de la traduction de la série d’articles du père Uwe Michael Lang, C.O., parue dans la revue liturgique Adoremus. On trouvera ici l’original.

Les historiens du christianisme primitif s’accordent à dire qu’il n’existait pas de forme écrite fixe pour la prière liturgique au cours des deux ou trois premiers siècles et que l’improvisation était de mise. Mais cette improvisation n’était pas le fruit du hasard ; elle s’inscrivait plutôt dans un cadre d’éléments stables et de conventions qui régissaient non seulement le contenu, mais aussi la structure et le style, d’une manière qui était largement redevable au langage biblique. Allan Bouley note que de tels éléments « sont vérifiables au deuxième siècle et indiquent que la prière extemporanée n’était pas laissée à la seule fantaisie du ministre. Au troisième siècle, et peut-être même avant, certains textes anaphoriques existaient déjà par écrit. » Bouley identifie donc une « atmosphère de liberté contrôlée »[1], puisque les préoccupations d’orthodoxie limitaient la liberté de l’évêque ou du prêtre de varier les textes de la prière. Ce besoin devint particulièrement pressant lors des luttes doctrinales du quatrième siècle, et à partir de ce moment-là, les textes des prières eucharistiques, tels que le Canon romain et l’Anaphore de saint Jean Chrysostome, furent fixés.

Transmission orale et mémorisation

Dans une étude sur l’improvisation dans la prière liturgique, Achim Budde analyse trois anaphores orientales utilisées sur une zone géographique considérable : la version égyptienne de l’Anaphore de saint Basile, l’Anaphore de saint Jacques de Syrie occidentale et l’Anaphore de Nestorius de Syrie orientale. En appliquant une méthode comparative, Budde identifie des modèles communs et des éléments stables de structure et de style rhétorique, qui, selon lui, remontent à l’histoire pré-littéraire de ces prières eucharistiques et peuvent avoir été transmis par mémorisation[2]. L’approche méthodologique de Budde est un complément et un correctif important à celle de Bouley, qui semble sous-estimer l’importance de la mémoire dans une culture orale. Sigmund Mowinckel, connu surtout pour son travail exégétique sur les Psaumes, a observé que le développement rapide de formes fixes de prière correspond à un besoin religieux essentiel et constitue une loi fondamentale de la religion[3]. La formation de textes liturgiques stables peut donc être considérée très tôt comme une force puissante dans le processus de transmission de la foi chrétienne.

La pratique largement orale de la prière liturgique primitive n’a donné lieu qu’à quelques anaphores écrites que l’on peut dater avec une certaine probabilité de la période pré-nicéenne. Trois textes sont généralement mentionnés : le modèle de prière eucharistique de la Tradition apostolique (qui a été examiné dans le deuxième volet de cette série), l’Anaphore d’Addai et de Mari, et le papyrus de Strasbourg. Cependant, les questions relatives à leur date et à leur éventuelle forme primitive restent sans réponse définitive. Ainsi, l’avertissement du liturgiste anglican Kenneth Stevenson mérite d’être cité dans son intégralité : « Tous les experts liturgiques de l’Antiquité savent qu’Hippolyte pourrait, de façon concevable, avoir été un archaïsant syrien fictif, faisant ses propres affaires, en désaccord avec le pape ; Addai et Mari pourraient avoir été mutilés au point d’être méconnaissables lors des ajustements liturgiques du patriarche Iso’yahb au VIIe siècle (qui impliquaient des abréviations) et le papyrus de Strasbourg pourrait être le fragment d’une anaphore précoce qui a ensuite inclus des éléments aujourd’hui perdus mais très différents, par leur style et leur contenu, de l’anaphore grecque ultérieure, dite de saint Marc (complète). Avec les compilateurs de textes liturgiques, tout est possible »[4].

L’anaphore de Barcelone

Les recherches de Michael Zheltov sur l’Anaphore de Barcelone, qui se trouve sur le papyrus du IVe siècle P. Monts. Roca env. 128-178 sont d’une certaine importance. L’anaphore contient un dialogue d’ouverture, une prière de louange et d’action de grâce conduisant au Sanctus, une oblation du pain et de la coupe, une première épiclèse demandant au Père d’envoyer l’Esprit Saint sur le pain et la coupe et d’en faire ainsi le corps et le sang du Christ, un récit de l’institution suivi d’une anamnèse, une seconde épiclèse demandant les fruits spirituels de la communion, et une doxologie finale.

Comme le papyrus de Strasbourg, légèrement plus tardif, l’Anaphore de Barcelone appartient à la tradition alexandrine. Le fait qu’il s’agisse d’une prière eucharistique pleinement développée appuie fortement l’argument selon lequel le papyrus de Strasbourg est fragmentaire et ne contient pas une anaphore complète (comme proposé ci-dessus). En même temps, le texte de Barcelone manque de certains éléments de la tradition alexandrine ultérieure, comme les longues intercessions qui précèdent le Sanctus. Michael Zheltov note également que les textes liturgiques du papyrus présentent des caractéristiques théologiques archaïques (par exemple, le fait de s’adresser à Jésus en tant qu' »enfant » ou « serviteur » comme dans la Didaché et la Tradition apostolique), ce qui pourrait indiquer que l’anaphore date du troisième siècle. L’Anaphore de Barcelone appelle certainement à une révision des études récentes sur le développement précoce des prières eucharistiques. À tout le moins, elle remet en question la théorie avancée par Paul Bradshaw et Maxwell Johnson, entre autres, selon laquelle certains éléments, tels que le récit de l’institution et l’épiclèse, devraient être considérés comme une interpolation du quatrième siècle. Comme l’affirme Zheltov,  » ces parties n’ont pas une nature interpolée mais organique « [6] Si l’Anaphore de Barcelone peut effectivement être datée du troisième siècle, cela augmenterait la plausibilité d’une chronologie similaire pour la prière eucharistique dans la Tradition apostolique.

Liturgie et langue sacrée

Le langage liturgique se distingue des autres formes de discours chrétien par l’emploi de registres linguistiques qui expriment la relation de la communauté de foi avec le transcendant sous forme de louange, d’action de grâce, de supplication, d’intercession et de participation aux sacrements. L’utilisation du langage dans la liturgie présente des caractéristiques générales qui, à des degrés divers, la distinguent du langage courant.

Selon Christine Mohrmann, la pratique précoce de l’improvisation dans un cadre stable a conduit à un style de prière liturgique nettement traditionnel[7]. Il existe un phénomène similaire dans le domaine de la littérature, la langue stylisée des epos homériques avec ses formes de mots consciemment archaïques et colorées (Homerische Kunstsprache). La liberté des chanteurs d’improviser sur le matériau donné dans les poèmes épiques a contribué à la création d’une langue stylisée. La langue de l’Iliade et de l’Odyssée, que l’on retrouve également chez Hésiode et dans des inscriptions poétiques ultérieures, n’a jamais été une langue parlée utilisée dans la vie quotidienne[8].

Avec Mohrmann, nous pouvons citer trois caractéristiques de la langue sacrée ou, comme elle le dit aussi,  » hiératique « . Premièrement, elle tend à faire preuve de ténacité en s’accrochant à une diction archaïque (un exemple dans l’usage anglais contemporain serait « Our Father, who art in heaven… « ) ; deuxièmement, des éléments étrangers sont introduits afin de s’associer à une tradition religieuse vénérable, par exemple, le vocabulaire biblique hébreu dans l’usage grec et latin des chrétiens, comme amen, alleluia et hosanna (ceci est déjà noté par Saint Augustin) ;[9] et, troisièmement, le langage liturgique emploie des figures rhétoriques typiques du style oral, comme le parallélisme et l’antithèse, les clausules rythmiques, la rime et l’allitération.

Conclusion

Au cœur de l’Eucharistie se trouve la grande prière d’action de grâce, dans laquelle les offrandes de pain et de vin sont consacrées comme le corps et le sang du Christ. Les chercheurs continuent à débattre des questions de datation et des formes antérieures possibles des prières eucharistiques qui sont considérées comme provenant de la période pré-constantinienne. Alors que le quatrième et le cinquième siècle ont remodelé la célébration liturgique de l’Eucharistie, le contenu théologique et spirituel des anaphores de cette période s’est construit sur des bases déjà existantes. Le prochain volet de cette série proposera une étude de ces anaphores « classiques » de l’Orient chrétien.


Pour les volets précédents de la série « Brève histoire du rite romain de la messe » du père Lang, voir la premièrela deuxième partie et la troisième partie.


Notes

  1. Allan Bouley, From Freedom to Formula: The Evolution of the Eucharistic Prayer from Oral Improvisation to Written Texts, Studies in Christian Antiquity 21 (Washington, DC: Catholic University of America Press, 1981), xv. 
  2. See Achim Budde, “Improvisation im Eucharistiegebet. Zur Technik freien Betens in der Alten Kirche,” in Jahrbuch für Antike und Christentum 44 (2001), 127-144. 
  3. Sigmund Mowinckel, Religion und Kultus, trans. Albrecht Schauer (Göttingen: Vandenhoeck & Ruprecht, 1953), 8, 14, and 53. 
  4. Kenneth Stevenson, Eucharist and Offering (New York: Pueblo, 1986), 9. 
  5. Michael Zheltov, “The Anaphora and the Thanksgiving Prayer from the Barcelona Papyrus: An Underestimated Testimony to the Anaphoral History in the Fourth Century,” in Vigiliae Christianae 62 (2008), 467-504. 
  6. Ibid., 503. 
  7. See Christine Mohrmann, Liturgical Latin: Its Origins and Character. Three Lectures (London: Burns & Oates, 1959), 24. Her collected studies are published in: Études sur le latin des chrétiens, 4 vol. (Rome: Edizioni di Storia e Letteratura, 1961-1977). 
  8. See Mohrmann, Liturgical Latin, 10-11. 
  9. Augustine of Hippo, De doctrina christiana, II,11,16. 

Dénigrer la prière vocale au profit de la prière mentale : histoire d’un désastre

Ce texte est une traduction d’un article du Dr. Peter Kwasniewski sur New Liturgical Movement. Nous le remercions pour son aimable autorisation. Les notes de l’auteur sont indiquées par des chiffres, celles du traducteur, par des lettres. Illustration de couverture : David priant les psaumes, Psautier d’Ingeburge, début XIIIe.


Ceux qui ont étudié l’histoire de la spiritualité connaissent l’important glissement qui s’opère en Occident entre ce que l’on pourrait appeler la devotio antiqua, ou devotio monastica(a), et la devotio moderna (née aux XIVe-XVe siècles). La première est, pour parler familièrement, une spiritualité entrée-plat-dessert : la liturgie et la lectio divina sont les plats principaux – le culte divin public et la lecture privée (de l’Écriture, des Pères de l’Église, des commentaires sur les Psaumes) accompagnée de la prière vocale, permettent d’entrer en contemplation ; et à cela s’ajoute une bonne dose d’ascétisme matériel. En somme, ni plus ni moins que la spiritualité monastique[1].

Une fois le passage à la devotio moderna entamé, nous étions condamnés, pour ainsi dire, à aboutir au concept moderne de « prière mentale », et spécifiquement à quelque chose qui ressemblerait aux exercices de saint Ignace. Dans cette brève étude, je n’ai pas l’intention d’attaquer la devotio moderna en tant que telle, et encore moins ses déclinaisons chez les jésuites et les carmélites, mais j’aimerais plutôt examiner ce qui se passe lorsqu’une certaine attitude vis-à-vis de la prière mentale commence à détourner de la prière vocale et donc liturgique, et ultimement à la dévaloriser. Il me semble qu’il s’agit là d’une clé de compréhension de la négligence et du dénigrement progressifs subis par la liturgie, jusqu’à devenir une espèce de matériau brut qu’on exploite à des fins dévotionnelles[2].

Le théologien grec-orthodoxe Kallistos Ware (1934-2022), récemment décédé (qu’il repose en paix), fait une excellente remarque sur les raisons pour lesquelles les premiers moines de l’Église se sont infligés des austérités aussi extrêmes, et souvent choquantes pour nous :

« La sévérité et la stricte discipline de la vie monastique primitive produisent un phénomène qui mérite certainement d’être examiné, et qui participe des raisons pour lesquelles certains hommes décident de rejoindre une communauté religieuse ; il s’agit de la corrélation indéniable entre la rudesse des épreuves et une formidable mobilisation de ressources intérieures, souvent insoupçonnées. Les mots ne peuvent pas vraiment rendre compte de ce qui s’y passe, mais le fait semble bien établi. Dans le témoignage de l’Archipel du Goulag, dans celui d’hommes comme Soljenitsyne, Tertz(b), Panin(c) et Shifrin(d), dans les archives du raz-de-marée de misère déclenché par le nazisme allemand, il y a une preuve constante et admirable de la capacité de certains individus, alors qu’ils subissaient les pires privations, à libérer un dynamisme intérieur, qui se manifeste souvent par une foi impérieuse en Dieu, et qu’il ne faudrait pas confondre avec une espèce d’échappatoire mentale pourtant bien compréhensible. Cela s’est produit trop souvent au vingtième siècle pour être considéré comme un épiphénomène sans importance ; et on y discerne un lien avec les épreuves volontaires et les prouesses ascétiques des premiers moines de l’Église. Les importantes différences d’époque et de circonstances n’altèrent pas ce qu’il y a de commun entre le saint des premiers temps et le prisonnier de notre époque qui s’est élevé au-delà de la souffrance brute et de l’oppression, pour arriver à un trésor intérieur dépassant l’imagination[3]. »

Ceci, bien sûr, n’est qu’une vision partielle de la nature et de la motivation des austérités monastiques. Mais les limites mêmes de cette vision clarifient le message : qui considère aujourd’hui la vie religieuse comme à une auto-condamnation volontaire à une vie entière au Goulag (pour ainsi dire), afin de récolter la moisson spirituelle qu’une telle peine apportera ? Pourtant, c’est clairement ce que les premiers moines croyaient faire. Ils n’imaginaient pas les souffrances comme une étape initiale qui finirait par s’effacer ; ils pensaient que ces souffrances finiraient par leur paraître moins pénibles et moins importantes, simplement parce que l’amour de Dieu grandirait et dépasserait ces souffrances, même si elles-mêmes continuaient ou augmentaient.

Saint Antoine abbé et Saint Paul ermite, Velasquez, vers 1634

Les ouvrages de théologie spirituelle à partir du XVIe siècle (voire avant) présentent un grave défaut : à un moment donné, la compréhension du lien entre la prière et la récitation de l’Office divin semble avoir été perdue. L’approche habituelle de ces ouvrages est de distinguer entre la prière vocale et la prière mentale ; de traiter ces deux formes de prière comme s’excluant mutuellement, en définissant la prière vocale comme la prière exprimée vocalement par des mots extérieurs, et la prière mentale comme la prière exprimée purement mentalement sans aucun son ou mot ; et de décrire la prière mentale plutôt que vocale comme le moyen par lequel un religieux atteint la perfection.

Dans ce schéma, la prière vocale est considérée comme valable a) en tant que prière pour les débutants, b) comme exercice d’obéissance, rendu nécessaire par les règles des congrégations, qui exigent certaines formes de prière vocale, c) en tant qu’accomplissement de l’obligation de l’Église d’offrir un culte collectif à Dieu. La récitation de l’Office divin par les moines est classée dans la catégorie de la prière vocale ; par conséquent, elle cesse d’être considérée comme la principale forme de prière monastique, l’Opus Dei, et le principal chemin vers la perfection monastique. C’est la prière mentale pratiquée en dehors de l’Office divin qui est supposée être le moyen de cette perfection.

Un exemple lamentable de cette attitude se trouve dans Holy Wisdom (traduit en français sous le titre Sainte Sapience), de Dom Augustine Baker, un ouvrage de conseils spirituels écrit spécialement pour les moines bénédictins, et qui est excellent à bien d’autres égards. Dom Augustine parle ainsi de la prière des premiers moines :

« Or, afin que, en comparant la manière de vivre observée autrefois par les religieux avec la manière moderne de nos jours, il apparaisse de quels grands avantages ils disposaient par rapport à nous pour atteindre la perfection de la prière, nous pouvons considérer : 1. leurs dévotions fixes (et fixes, elles l’étaient) ; et, 2. leurs tâches ordinaires pendant le reste de la journée. En ce qui concerne le premier point, leurs dévotions fixes, qu’elles soient publiques ou privées, consistaient uniquement à réciter le psautier, auquel ils ajoutaient parfois une petite lecture d’autres parties de l’Écriture. Quant à la prière mentale conventuelle, elle était très courte, se réduisant aux brèves inspirations que l’Esprit de Dieu leur suggérait en particulier, comme la fleur de leurs prières vocales publiques. En privé, lorsqu’ils s’appliquaient délibérément à la prière, ils s’écartaient rarement de la manière dont ils faisaient leurs dévotions publiques, car alors ils utilisaient aussi le psautier. »

Dom Augustine Baker

Jusqu’ici, tout va bien ! Mais ensuite, il poursuit :

« On ne peut nier que, dans les temps anciens, beaucoup de saintes âmes ne soient parvenues à la contemplation parfaite par le seul usage de la prière vocale ; ce qui aurait le même effet sur nous si nous voulions ou pouvions les imiter dans cette merveilleuse solitude, ces abstinences rigoureuses et cette incroyable assiduité à prier. Mais au lieu de ce genre de vie, et dans l’impossibilité de soutenir une si longue attention à Dieu sans distraction, nous sommes invités à nous adjoindre l’aide d’exercices quotidiens de prière mentale, afin d’atteindre un état constant et habituel de recueillement, en réparant les distractions dans lesquelles nous vivons tout le reste de la journée. »

Curieuse forme d’argumentation : puisque nous, modernes, sommes plutôt paresseux, que nous avons horreur de la solitude, de l’abstinence et de l’assiduité, et que la prière vocale est beaucoup trop chronophage, il nous faut trouver une forme de prière qui ressemblerait, plutôt qu’à un repas complet, à un concentré de vitamines.

« Cependant, la main de Dieu n’est pas impuissante : s’il lui plaît, il peut toujours appeler les âmes à la contemplation par la voie de la prière vocale, de sorte qu’elles en fassent leur exercice général et ordinaire. Dans ce cas, ces âmes devront observer, dans leur vie, les conditions suivantes :
Premièrement, s’adonner à une plus grande mesure d’abstraction et de mortification que celle qui est nécessaire à ceux qui pratiquent la prière mentale. La raison en est que l’oraison interne, étant beaucoup plus profonde et tournée vers le dedans de soi, offre une lumière et une grâce beaucoup plus grandes pour découvrir et guérir les désirs déréglés ; elle amène également l’âme à une plus grande simplicité, à une plus grande facilité à se recueillir, etc., et par conséquent l’oraison vocale, pour réparer, devait être accompagnée d’une plus grande abstraction, etc.
Deuxièmement, ceux qui emploient la prière vocale doivent s’obliger à consacrer à leurs exercices quotidiens un temps plus grand que celui qui est nécessaire aux autres, afin de suppléer ainsi à la moindre efficacité de la prière vocale. »

Les pères du désert, saint Benoît, et les grandes figures monastiques de l’histoire de l’Église, auraient été assez surpris de découvrir que la prière vocale publique, officielle, solennelle et corporative de l’Église est moins efficace qu’une « prière intérieure » (quelque peu solipsiste).

« Troisièmement, s’ils se trouvent à un moment donné invités par Dieu, intérieurement, à une pure prière intérieure (ce qui est certainement naturel pour ce genre d’inspiration), ils doivent alors céder à cette invitation, et pour le moment interrompre ou cesser leurs exercices vocaux volontaires aussi longtemps qu’ils se trouvent capables de les exercer intérieurement à la place. Ces conditions doivent être observées par tous ceux qui, soit dans la religion, soit dans le monde, désirent progresser en vie spirituelle, et qui ne peuvent sans une extrême difficulté commencer ce parcours par une simple prière intérieure.
L’usage de la prière vocale volontaire en vue de la contemplation peut, au début d’un parcours spirituel, être indiqué : 1. pour les personnes simples et non instruites (surtout les femmes) qui ne sont pas du tout aptes à la prière discursive ; 2. et certes, même pour les plus instruits, si elle est utilisée comme un moyen d’élever et d’améliorer leur attention à Dieu ; cependant, elle doit toujours laisser la place à la prière interne lorsqu’ils s’y trouvent disposés. »

La prière vocale est donc, pour Dom Augustine, soit un moyen d’occuper le « sexe faible », soit comme des roulettes pour vélo à réserver aux débutants.

Les moines de Clear Creek à l’Office : une scène ordinaire en Chrétienté

« Mais quant à la prière vocale, publique ou privée, que les lois de l’Église rendent obligatoire, le prétexte qu’on trouve plus de profit dans les exercices mentaux n’est nullement un motif suffisant pour la négliger ou la déprécier [ouf !] ; car bien que certaines âmes, d’une disposition supérieure, puissent peut-être s’avancer plus vers la perfection par des exercices uniquement mentaux, cependant, puisque généralement, même dans la religion, les âmes sont si tièdes et si négligentes, que si elles étaient laissées à leurs propres dévotions volontaires, elles n’exerceraient presque jamais la prière vocale ou mentale ; c’est pourquoi, dans la mesure où il n’est pas possible de faire acception des personnes, il était nécessaire que tous soient obligés d’accomplir extérieurement et publiquement le service divin, en louant Dieu par leur bouche (qui nous a été donnée à cette fin), afin qu’un ordre et un décorum soient observés dans l’Église de Dieu, pour qu’elle puisse imiter les fonctions des anges et des saints, dans une union solennelle des cœurs et des bouches pour glorifier Dieu. Cela était nécessaire aussi pour l’édification et l’invitation de ceux qui ne sont pas obligés à l’Office, qui peut-être ne penseraient jamais à Dieu, s’ils n’y étaient pas encouragés par le fait de voir de bonnes âmes passer la plus grande partie de leur temps à prier et à louer Dieu de façon si solennelle et régulière. »

L’utilitarisme dans l’argumentation qui précède est tout à fait remarquable, et il est encore plus remarquable que les contemporains de Baker aient jugé acceptable un tel genre de discours.

« Or, attendu qu’à toute espèce de prière, comme il a été dit, il faut nécessairement une attention de l’esprit, sans laquelle ce n’est pas une prière, nous devons savoir qu’il y a plusieurs sortes et degrés d’attention, tous bons, mais cependant l’un plus parfait et plus profitable que l’autre. Premièrement, voyons la réflexion expresse sur les mots et le sens de la phrase prononcée par la bouche ou par l’esprit. Cette attention, dans la prière vocale, doit nécessairement changer selon la succession des versets des psaumes, et ainsi de suite ; donc, elle ne peut fixer l’esprit ou les désirs sur Dieu ni puissamment ni efficacement, parce que cet esprit est constamment rappelé à de nouvelles considérations ou à des humeurs successives. C’est là le degré d’attention le plus bas et le plus imparfait dont toutes les âmes sont capables dans une certaine mesure, et plus elles sont imparfaites, plus il est facile à atteindre ; car les âmes qui ont envers Dieu un désir bon et stablement établi peuvent difficilement abandonner tel ou tel sentiment, par lequel elles sont unies à Dieu, et qu’elles trouvent doux et profitable pour elles, pour l’échanger contre un nouveau qui lui succède à l’Office ; et si elles le faisaient, ce serait à leur préjudice. »

Les significations successives et variées des versets des psaumes sont ici décrites comme une distraction à l’union avec Dieu. D’une certaine manière, cela est vrai, mais l’approche de Baker est étrangement dualiste. Le but de la prière vocale répétée n’est-il pas de louer Dieu comme Lui-même le souhaite, de former la conscience de celui qui loue d’une certaine manière, de préparer l’âme à Dieu, et même de Le rencontrer dans sa Parole ?

« Le second degré [d’attention] est celui des âmes relativement bien éduquées à la prière mentale, et qui viennent à l’Office pleine d’un désir efficace de Dieu, soit préexistant, soit suscité en elles à l’occasion de cette récitation. Elles désirent invariablement poursuivre ce désir avec un recueillement aussi profond que possible, sans se soucier du fait que cela convienne au sens du passage qu’elles prononcent effectivement. Cette attention porte sur Dieu, et non sur les paroles, et est bien plus fructueuse que la première. Par conséquent, il serait à la fois préjudiciable et déraisonnable d’obliger les âmes à abandonner une telle attention pour la première. En effet, puisque toutes les prières vocales, de l’Écriture ou d’ailleurs, sont ordonnées exclusivement à cette fin de fournir et procurer à l’âme qui en a besoin le matériau des dispositions par lesquels elle puisse s’unir à Dieu, une âme qui a déjà atteint ce but, qui est l’union aussi longue que possible, ne devrait pas en être séparée, et être obligée de chercher un nouveau moyen avant que l’efficacité du premier soit épuisée. »

Dominicains en pleine distraction, à en croire Dom Baker. Photo : Fr. Lawrence Lew o.p.

Le contenu verbal réel serait sans effet sur les dispositions internes, et il faudrait cesser de prêter attention aux mots afin de cultiver un certain état intérieur le plus longtemps possible. Dans cette analyse, les mots ne sont rien d’autre que du bois, coupé en morceaux et introduit dans la fournaise du cœur. Cela semble merveilleusement pieux, mais une position aussi profondément anti-intellectuelle trouve son exutoire final dans ce que Knox(e) appelle Enthusiasm, c’est-à-dire ce sentimentalisme exalté cher au mouvement charismatique. Pourquoi Dieu s’est-il donné la peine de révéler le sens de tel passage, ou même d’utiliser des mots ? Baker poursuit :

« Un troisième degré d’attention à l’Office divin, le plus sublime, est celui par lequel les prières vocales deviennent mentales, c’est-à-dire par lequel les âmes les plus profondément unies à Dieu avec une parfaite simplicité peuvent, sans aucun préjudice à cette union, s’occuper aussi du sens et de l’esprit de chaque passage qu’elles prononcent, et par là même augmenter et purifier leurs sentiments, leur adhésion et leur union à Dieu. Ce degré d’attention ne s’atteint pas avant que l’âme ne soit arrivée à la contemplation parfaite, au moyen de laquelle l’esprit est si habituellement uni à Dieu, et de plus, l’imagination si soumise à l’esprit qu’elle ne peut se reposer sur rien qui puisse la distraire. Heureuses les âmes (dont Dieu sait que le nombre est très petit) qui sont parvenues à ce troisième degré, auquel il faut monter par une pratique attentive des deux premiers dans leur ordre, surtout du second degré ! C’est pourquoi, dans la récitation de l’Office, les âmes les plus imparfaites feront bien, lorsqu’elles se trouveront dans un bon état de recueillement, de le prolonger aussi longtemps qu’elles le pourront, en conservant autant de stabilité que possible dans leur imagination. »

On voit mal comment atteindre ce troisième degré — qui consiste à unir les dispositions intérieures et la conscience extérieure du « sens et de l’esprit de chaque passage » — en dénigrant le texte, en le considérant comme une distraction, et en encourageant, dans une logique utilitaire, ou l’indifférence à son égard, ou son exploitation.

Les effets catastrophiques de cette conception de l’Office divin sont évidents : dès que l’on peut trouver, ou que l’on pense avoir trouvé, une meilleure manière d’élever nos sentiments vers Dieu, ou une meilleure méthode pour susciter la prière mentale, on laissera tomber son bréviaire(f) comme une vieille chaussette. Et pourtant, la position de Baker est tout à fait ordinaire parmi les auteurs spirituels de la Contre-Réforme. Sa valeur pour nous aujourd’hui devrait être de donner une exposition claire de ce qu’il ne faut pas croire à propos de la récitation de l’Office divin, et de nous éduquer à la valeur de cette récitation, en tenant fermement l’exact contraire de ce que dit Baker.

Ce n’est pas en raison de leurs grandes austérités que les pères de l’Antiquité ont été en mesure de tirer un bénéfice spirituel de la prière vocale ; au contraire, ils ont reçu la grâce de supporter ces austérités en raison de leur dévotion à la prière des Psaumes. La récitation vocale des prières renforce notre compréhension intellectuelle et spirituelle, et notre assentiment à ces prières, plutôt que le contraire, de sorte que la prière vocale est, en soi, une forme de prière mentale, supérieure à la prière silencieuse. C’est aussi une profession de foi publique, une louange publique, et une pétition publique à Dieu, qui sont chacune supérieure aux actes privés de même nature. Le contenu de la prière vocale de l’Office est supérieur au contenu des prières mentales que nous formulons par nous-mêmes, même si cette formulation se faisait sous la conduite de l’Esprit Saint, car ce que nous prions est divinement révélé.

Pour toutes ces raisons, la prière vocale de l’Office divin est plus apte à nous conduire à la perfection que la prière purement mentale, et elle est en fait le principal chemin vers la perfection, comme les premiers Pères monastiques l’avaient compris. Je parle ici avec une certaine expérience ; le fait de commencer à prier les Psaumes dans le Diurnal Monastique a radicalement changé, en mieux, ma compréhension de la prière et de la vie chrétienne, parce que je priais ce que Dieu avait à dire, et non ce que moi j’avais à dire. Lorsque nous prions l’Office, nous devons donc nous efforcer de le comprendre et d’y associer notre esprit ; c’est la principale façon de prier. C’est pourquoi saint Benoît dit que les moines doivent consacrer du temps à l’étude des psaumes, afin de comprendre ce qu’ils prient et donc de mieux prier.

Il est frappant de constater que les biographies de sainte Thérèse de Lisieux affirment, tantôt, qu’elle aimait beaucoup dire l’Office, puis s’empressent de résumer son genre de sainteté en disant qu’elle supportait les sœurs pénibles et faisait beaucoup oraison. Tout cela est vrai, mais dire l’Office était, pour ainsi dire, son métier dans l’Église ! C’était l’objet du genre de vie religieuse qu’elle avait choisi, et cela prenait la plus claire partie de son temps. Elle n’a pas essayé de s’y soustraire, et aucun des grands maîtres spirituels ne s’y est soustrait. Au contraire, ils l’ont considéré comme allant de soi, comme la toile de fond de leur vie spirituelle.

Aujourd’hui, l’Office divin n’a rien d’une évidence. En dehors du monde traditionaliste(g), il n’est pas très en forme, si ce n’est presque tombé dans l’oubli. Il n’est pas nécessaire d’avoir une connaissance approfondie de l’histoire de l’Église pour se rendre compte le renouveau de la vie religieuse(h) se fera dans et par l’Office Divin, ou ne se fera pas.


Je tiens à remercier le Dr John Lamont pour sa collaboration à cet article, spécialement pour le texte de Dom Augustine Baker.

[1] Pour ceux qui souhaitent suivre la voie de la devotio antiqua ou de la devotio monastica, voici une feuille de route. Tout d’abord, visitez un monastère bénédictin observant (NdT : l’un de ceux qui emploient le Psautier de la Règle, c’est-à-dire en France surtout ceux de la congrégation de Solesmes et ceux attachés à la liturgie ancienne) et passez-y autant de temps que possible, idéalement lors d’une retraite annuelle. Lors de cette visite, procurez-vous un exemplaire de l’Office bénédictin (tel que le Diurnal Monastique du Barroux) et apprenez à le prier en latin. Deuxièmement, adoptez une règle de jeûne et de pauvreté. Aimer le jeûne : l’expérience monastique d’Adalbert de Voguë o.s.b. est un bon guide. Troisièmement, soyez conscient du contexte et des limites des livres de conseils spirituels que vous lirez. Les grands classiques traditionnels, comme ceux de saint Jean Climaque et de saint Jean Cassien, sont excellents, mais il faut garder à l’esprit qu’ils ont été écrits pour des hommes qui vivaient déjà la vie monastique et que, par conséquent, ils considèrent acquis les éléments essentiels de cette vie. Ils ne parlent pas beaucoup du jeûne, de l’observation de la règle et de la prière liturgique, car leurs lecteurs avaient été instruits à ce sujet par d’autres sources ; ils sont censés être un supplément à la vie monastique, et non un guide pour l’ensemble de celle-ci. C’est pourquoi le temps passé avec les moines ou les moniales est si important. Pour en savoir plus, consultez mes articles « What a visit to an observant Benedictine monastery can teach us » ; « Even if you can’t be a monk, you can still benefit from monastic life. Here’s how » ; et « Looking for a new examination of conscience? Try the Rule of St. Benedict« . (NdT : nous ne partageons pas l’idée que la forme de spiritualité basée sur la prière liturgique de l’Église puisse être qualifiée de monastique ; c’est plutôt la spiritualité catholique « ordinaire », « de base ».)

[2] J’en parle dans deux articles précédents sur NLM : « The Ironic Outcome of the Benedictine-Jesuit Controversy » et « Objective Form and Subjective Experience: The Benedictine/Jesuit Controversy, Revisited« . Le premier a été révisé et publié sous forme de chapitre dans mon livre Noble Beauty, Transcendent Holiness.

[3] Préface de L’Échelle du Paradis de saint Jean Climaque, Classics of Western Spirituality, pp. xvi-xvii.

(a) Nous ne partageons pas l’idée que la forme de spiritualité basée sur la prière liturgique de l’Église puisse être qualifiée de monastique ; c’est plutôt la spiritualité catholique ordinaire.

(b) Andreï Siniavski, dit Abram Tertz, rescapé du Gloulag, auteur de Une voix dans le chœur.

(c) Dimitri Panin, rescapé du Goulag, auteur du Journal de Solgdin.

(d) Avraham Shifrin, rescapé du Goulag, militant sioniste et plus tard homme politique israélien.

(e) Ronald A. Knox, prêtre anglais, critique les excès sectaires de certains mystiques autoproclamés dans son essai Enthusiasm.

(f) On aurait dû écrire : son antiphonaire, puisque l’Office est une prière chorale.

(g) Et même au sein du monde traditionaliste, les fidèles peuvent rarement s’associer à l’Office en dehors des vêpres des dimanches et fêtes, qui sont assez répandues.

(h) L’auteur ne parle pas que de la vie consacrée, mais bien de la vie de toute l’Église, et nous partageons cet avis.

QUAERITUR : De la position des doigts du prêtre et de la purification

Article original du Père John Zuhlsdorf, posté le 16 août 2013

De la part d’un lecteur : 

Notre prêtre s’applique vraiment à garder son pouce et son index joints une fois qu’il a touché l’hostie. Je me demandais s’il s’agissait d’un geste symbolique, car je n’ai jamais vu nos ministres eucharistiques ou notre diacre se laver les mains ? (Le terme correct est en réalité « ministre extraordinaire de la Sainte Communion », et non « ministres eucharistiques »). Dans mon orgueil et mon jugement, je suis parfois un peu en colère face à leur manque de révérence et je sais que je peux me tromper. Merci et que Dieu vous bénisse.

Tant de personnes ont été blessées et sont blessées, mon ami.

Votre description de ce que fait le prêtre, en gardant ses index et ses pouces ensemble, est cohérente avec ce que les prêtres ont été requis par les rubriques de faire pendant la Messe après la consécration.  Les prêtres sont toujours tenus, dans la forme extraordinaire, de maintenir l’index et les pouces serrés l’un contre l’autre au niveau des « coussinets », pour ainsi dire, afin d’éviter que toute particule reconnaissable qui aurait pu adhérer aux doigts ne tombe à l’extérieur du corporal (la toile de lin carrée étendue sur l’autel sur laquelle reposent le calice et les hosties).  C’est aussi pourquoi, après la consécration, le prêtre devait garder sa main autant que possible sur le corporal.  C’est aussi pourquoi il est bon, pendant la messe, lorsque le calice est découvert, que le prêtre frotte doucement ses doigts et ses pouces l’un contre l’autre sur le calice, afin que les particules tombent dans le calice plutôt qu’ailleurs.  Cela devient une habitude et il n’est pas nécessaire de faire un effort ou de prendre du retard pour le faire.

Ces gestes ne sont pas exigés par les rubriques du Novus Ordo.

C’est une bonne chose à faire de toute façon.

Premièrement, cela a du sens.  Deuxièmement, c’est ce que font les prêtres.

Certains objecteront que cette pratique semble fastidieuse ou même – gasp – scrupuleuse.

Je réponds en disant que les particules reconnaissables restent le Corps et le Sang, l’âme et la divinité du Seigneur.  Je pense que l’Eucharistie mérite notre soin et notre attention.

À plusieurs reprises, j’ai senti une particule rester sur mes doigts, pressée entre les coussinets de mon pouce et de mon index.  Cela peut se produire plus fréquemment lorsque les hosties sont sèches ou ont des bords rugueux ou mal « pressés ».

Je suis un pécheur, mais lorsque je me présenterai devant le Seigneur pour son jugement, il ne me dira pas que j’ai été négligent avec lui pendant la messe.  Honte aux prêtres qui sont négligents.

Pères !  Les gens voient ce que vous faites quand vous êtes là-haut et ce que vous ne faites pas.  Faites attention à l’Eucharistie !  Purifiez bien les vases !  Ne laissez pas des fragments partout !

J’ai eu des sacristains inquiets qui m’ont montré des patènes de calices sur lesquelles il restait des particules.  Pour l’amour de DIEU !  Purifiez soigneusement !

Quoi qu’il en soit, en ce qui concerne le lavage des mains, poursuivons avec cela pendant un moment ou deux.

Le prêtre – selon l’ancienne façon de faire – devrait se laver les mains avant de vêtir en disant la prière « Da, Domine, virtutem manibus meis ad abstergendam omnem maculam immundam ; ut sine pollutione mentis et corporis valeam tibi servire. … Donne la vertu à mes mains, Seigneur, afin qu’étant purifié de toute tache je puisse te servir sans impureté d’esprit et de corps ».  Hélas, certaines sacristies n’ont pas d’évier, et encore moins de sacraria !  Grrrr.  Ensuite, pendant la messe, il purifie ses doigts après avoir préparé les « dons ».  Dans le nouveau rite, il dit simplement : « Lava me ab iniquitate mea et a peccato meo munda me … Lave-moi de mon iniquité, et purifie-moi de mon péché. » Dans le rite ancien, il récite le Lavabo, tiré du psaume 26. Dans l’ancienne forme du rite romain, il continue, comme je l’ai mentionné ci-dessus, à se laver les doigts après la consécration. Enfin, après la communion et pendant les ablutions, lorsqu’il purifie les vases, il purifie à nouveau le bout de ses doigts. Au cours des ablutions, avant que le vin et l’eau ne soient versés sur les doigts qu’il tient au-dessus de la coupe du calice, il dit : « Corpus Tuum, Domine,… Que ton Corps, Seigneur, que j’ai reçu, et ton Sang que j’ai bu, s’attachent à mes entrailles, et fais qu’aucune tache de péché ne subsiste en moi, qui ai été nourri de ce pur et saint Sacrement…. ».  Tout ce qui a trait à la purification des doigts, des récipients et à la sauvegarde de l’Eucharistie doit être accompli avec une attention sérieuse.

En ce qui concerne, cependant, la révérence du prêtre – vous ne pouvez pas savoir avec certitude ce qu’il a dans son cœur ou dans son esprit.  Vous ne pouvez voir que le reflet extérieur de sa participation intérieure pleine, consciente et active, qui, parce qu’il est le prêtre, doit être exemplaire.  

Le prêtre doit instruire soigneusement le diacre sur la purification des vases.  Malheureusement, la formation que certains diacres permanents ont reçue était… sous-optimale.  Les programmes diaconaux s’améliorent, mais, là pour un certain temps…. damn !

Et s’il y a des ministres extraordinaires, ils doivent bien sûr être instruits avec un soin particulier.

Je vais devoir laisser de côté le fait que je ne pense pas que les non-ordonnés devraient manipuler les vases sacrés à mains nues, et encore moins l’Eucharistie, à moins que ce ne soit absolument nécessaire.  Cela fera l’objet d’une autre diatribe à une autre occasion.

Missel Laudate : une recension

En collaboration avec la maison d’édition Artège
Lien pour acheter le missel Laudate: https://www.editionsartege.fr/livre/fiche/laudate

Les plus anciens se rappellent sans doute des missels des fidèles dont la première moitié du XXe siècle fut l’âge d’or. Des livres comme les « Dom Lefebvre » et « Maredsous » demeurent pour beaucoup d’entre nous de précieuses ressources.

L’essort de ces missels fut freiné avec la réforme liturgique. Beaucoup se disaient qu’ils ne se justifiaient que par l’exclusivité du latin dans la liturgie. Pourquoi tenir dans ses mains ce que l’on entend désormais dans sa langue ? Si quelques missels des fidèles furent publiés depuis, ils n’ont pas grand-chose en commun avec leurs prédecesseurs, dans la forme ou dans le fond ; en particulier, la tradition proprement latine, le propre de la Messe par exemple, brille par son absence.

Il manquait donc un missel qui pût réconcilier la réforme liturgique et la tradition des missels des fidèles. C’est ce manque que le missel grégorien Laudate, préparé par une équipe de laïcs et de prêtres (de la Communauté Saint-Martin pour l’essentiel), entend combler.

Avant d’examiner cet ouvrage en détail, notons que contrairement à ce que son titre complet pourrait indiquer, ce missel n’est pas tout à fait « grégorien », dans la mesure où il ne contient pas les partitions permettant de chanter la Messe (contrairement à l’excellent « Missel grégorien » de Solesmes, qui ne contient cependant pas les lectures), mis à part quelques exceptions sur lesquelles nous reviendrons plus bas.

Ce qui frappe au premier abord, c’est la beauté de l’ouvrage. Sa couverture noire (ornée d’une superbe enluminure dans l’édition standard), la dorure de ses pages (dans l’édition cuir), les illustrations, la présentation des textes confèrent au tout un aspect à la fois sobre et élégant.

Le livre est divisé en quatre parties. D’abord, le propre de chaque Messe, à savoir les oraisons (dans l’original latin et la traduction officielle nouvellement promulguée) et le propre grégorien : introïts, graduels, offertoires… accompagnés d’une traduction, celle-ci à usage privé, non liturgique (nous y reviendrons). Chaque Messe (à l’exception des féries de l’Avent et du Carême) est précédée d’une présentation et d’une méditation puisant dans les textes de la tradition grégorienne. Cette démarche, explicitement revendiquée dans l’introduction, éclaire tout l’ouvrage : il ne s’agit pas seulement de se laisser nourrir par les péricopes bibliques, comme le proposent les missels déjà existant, mais d’assimiler cette nourriture à l’aide de la liturgie et la tradition. On y retrouve donc deux fonctions essentielles de la liturgie : la formation des fidèles et le modèle de la foi, selon l’adage bien connu : lex orandi, lex credendi (la loi de la prière est la loi de la foi). Une deuxième partie, beaucoup plus courte, comprend l’ordinaire de la Messe, là encore en latin et français ; sont également indiquées les préfaces et un choix de textes pour la prière des fidèles.

La troisième partie comprend les lectures et les chants indiqués au lectionnaire (sauf pour quelques grandes fêtes, où ces lectures sont données en première partie). Assurément, faire tenir toutes les lectures de la liturgie rénovée en un seule livre était un défi de taille ; mais les rédacteurs du Laudate l’ont relevé en se limitant aux lectures du temporal, sauf lorsque le sanctoral indique des lectures propres obligatoires. Choix discutable, mais conforme à la nécessité autant qu’à la pratique habituelle. Esthétiquement, la présentation des lectures est un peu moins agréable que celle des textes propres (chants et oraisons) de la première partie.

La quatrième et dernière partie est un ensemble de prières, d’enseignements et de dévotions, allant des sacrements aux offices du dimanche en passant par le rosaire, le chapelet de la miséricorde et autres litanies. Un très riche ensemble de textes, dans la lignée, là encore, des anciens missels des fidèles, et où ceux-ci puiseront avec profit de quoi nourrir leur vie spirituelle. Une sélection de partitions d’ordinaires grégoriens pour l’année cloture l’ouvrage.

Puisque nous parlons des partitions, c’est le moment d’évoquer un point qui pourra passer pour un défaut : elles sont en notation moderne et non en notation grégorienne. Cela choquera les puristes et laissera les autres indifférents. Pour notre part, sans condamner ce choix, sans même y voir un défaut, nous nous interrogeons sur sa pertinence : après tout, la notation grégorienne n’est pas plus compliquée que la moderne et sa présence aurait pu constituer une porte d’entrée vers l’univers du plain-chant.

Si ce point n’est pas forcément un défaut, le Laudate contient tout de même des imperfections bien réelles ; si l’honnêteté nous oblige à les indiquer, elle nous intime aussi de préciser qu’elles sont très peu nombreuses et de faible importance. Quelques traductions discutables sont à déplorer (ainsi ne comprend-on pas pourquoi les traducteurs ont choisi de rendre « Beati » par « Heureux » quand « Bienheureux » semblait mieux indiqué) dans les textes français du propre ; la part laissée à l’office divin est trop faible (il eût été approprié d’insérer au moins les antiennes du Benedictus et du Magnificat des dimanches et fêtes de l’année) ; quelques coquilles sans importance pourraient être détectées ça et là.

On pourra aussi juger étrange le choix d’indiquer les lectures à part du propre chanté et des oraisons ; sans doute ne voulait-on pas grossir à l’infini un livre déjà volumineux. Mais ceci nous indique un des objectifs de ce missel, celui de distinguer la « Messe grégorienne » (chantée en grégorien) et la Messe « normale ou dialoguée ». Cet objectif semble clair si l’on se réfère aux multiples allusions à la beauté de la Messe grégorienne distinguée de « l’autre Messe ». Ainsi, à la présentation du lectionnaire : « Les deux systèmes du Graduel romain et du lectionnaire romain ayant chacun leur logique propre, ils ne peuvent être combinés sans dommage pour la liturgie » (page 1047) ; ou bien : « les textes des chants grégoriens ont fait l’objet d’une traduction libre qui n’est pas destinée à être lue dans la liturgie » (page 8), etc. autant de citations qui semblent tracer une barrière entre la liturgie connue des fidèles et celle des communautés de Solesmes, Kergonan, Saint-Wandrille et Evron.

Ce but nous semble très critiquable. Outre qu’il semble un peu artificiel (après tout, il s’agit non seulement du même rite, mais de la même forme rituelle, la forme ordinaire du rite romain), il paraît surtout dangereux. Si l’on présente la liturgie grégorienne comme une réalité à part de la liturgie habituelle, pourquoi les pratiquants de la seconde feraient-ils un pas vers la première ?

Cette petite réserve mise de côté, le Laudate n’en demeure pas moins un ouvrage exceptionnel, aussi inattendu que bienvenu, auquel nous souhaitons le plus grand succès.

La Guerre du Christ et l’Office de nuit

« L’acte pour l’accomplissement duquel le Christ est venu sur la terre, et que chaque Pâques renouvelle, peut être envisagé sous différents aspects ; mais son aspect le plus général est une guerre, ce combat que saint Paul résume en ces termes : “Ayant dépouillé les principautés et les puissances, il leur a signifié librement sa volonté, après les avoir assujetties à son triomphe.” Car l’esprit du mal s’étant, par sa fourberie, emparé de l’homme et par lui du monde, le Christ est venu pour ravir son empire au père du mensonge, en brisant ses armes, le péché et la mort, et rétablir sur toute créature le règne de Dieu. »

Le père Louis Bouyer a toujours été suspect aux bien-pensants. S’il est aujourd’hui soupçonné de traditionalisme, à cause des vives critiques qu’il a formulées à l’endroit de la réforme liturgique post-conciliaire, à l’époque où il écrit ces lignes dans Le Mystère pascal au début de 1945, il est bien plutôt suspect d’avoir conservé quelque chose du protestantisme dont il s’était converti à peine six ans plus tôt. « On voit bien que vous êtes protestant », lui disait un de ses premiers supérieurs à l’Oratoire : « vous vous intéressez trop à la Liturgie et à l’Écriture ».

Puisque l’Église n’est rien de plus que le prolongement dans le temps de l’action du Christ sous la conduite de l’Esprit Saint, ainsi la mission de l’Église peut-elle être envisagée sous différents aspects ; mais ainsi, également, son aspect le plus général et le plus essentiel est-il celui de cette guerre menée contre l’esprit du mal, le même combat qu’exprime toute la vie du Christ et toute l’action des apôtres. Guerre déjà gagnée par la mort et la résurrection du Chef de l’Église, mais dont une multitude de batailles restent à livrer. Guerre dont l’objet n’est pas l’établissement du règne de Dieu seulement sur les âmes, encore qu’elles soient son principal butin ; mais sur toute créature. La guerre de Dieu, et celle de l’Église, et celle de tout chrétien, est de conquérir toute chose, les âmes, les corps, les bêtes et les plantes, les voitures, les ordinateurs, les champs, les montagnes, les sculptures grecques et les bouteilles d’armagnac ; d’en extirper l’influence des forces du mal, et de les soumettre à la souveraineté du Christ.

Toute créature est un champ de bataille, tout chrétien est un soldat.

Je veux parler aujourd’hui d’un de ces champs de bataille : la nuit. Puisqu’il y a bataille, parlons tactique : quel est l’aspect du terrain ? Quelles sont les positions alliées, les positions adverses, le rapport de force ?

« L’Église s’en moque que [les prêtres soient] aimés, mon garçon. L’Église a besoin d’ordre. Faites de l’ordre à longueur du jour. Faites de l’ordre en pensant que le désordre va l’emporter encore le lendemain parce qu’il est justement dans l’ordre, hélas ! que la nuit fiche en l’air votre travail de la veille – la nuit appartient au diable. » — Georges Bernanos, Journal d’un curé de campagne

La nuit s’étend du coucher au lever du soleil. Elle est précédée du soir, suivie du matin ; elle inclut le crépuscule, où le soleil est caché mais où ses rayons illuminent encore le ciel ; la nuit noire où le monde est plongé dans les ténèbres ; et l’aurore, où le soleil, non encore levé, donne déjà sa lumière.

Dans nos sociétés, l’aurore appartient aux agriculteurs qui branchent la trayeuse à six heures, aux travailleurs pauvres qui prennent le train de banlieue pour Paris à six heures trente, aux boulangers et aux cafetiers qui passent le balai avant de sortir la fournée ou couler les premiers cafés. L’ennemi n’y a pas grande prise, car ceux qui dorment ne pèchent pas, et ceux qui se réveillent sont vainqueurs de leur faiblesse. L’Église loue le Seigneur victorieux à cause du nouveau jour qui s’annonce, avec l’office des Laudes, l’heure la plus eucharistique, c’est à dire qui rend grâce.

Le crépuscule est l’heure de la tentation. Le jour baissant est une occasion de confusion et de dissimulation. C’est l’heure de l’abrutissement devant la télévision ou l’ordinateur, de la recherche de la vaine gloire sur les réseaux sociaux, de la cinquième bière qui transforme l’homme en bête, en somme, l’heure où la vie intérieure est tuée, et Dieu, oublié. L’Église ne s’y trompe pas, qui demande pour ses fidèles, dans l’office des Complies, la force et le courage de résister aux tentations charnelles : « Hostemque nostrum comprime, ne polluantur corpora », repousse notre ennemi, que nos corps ne soient pas souillés. C’est un grand dommage que ces mots trop crus aient été supprimés dans la version moderne du Te Lucis : et pourtant, comme écrit encore Bernanos, « l’Église a les nerfs solides, le péché ne lui fait pas peur, au contraire, elle le regarde en face. »

Quant à la nuit noire : « la nuit appartient au diable. »

Les premières heures de nuit noire sont le temps des plus grandes luttes et des plus grands crimes, l’heure où les mystiques subissent les pires attaques jusque dans leur chair, l’heure où ce monde, soumis à son ténébreux prince, s’entasse dans des lieux presque consacrés au mal. Ensuite, les bons et les méchants s’endormiront, avant que Dieu fasse de nouveau ressurgir son jour.

L’intuition chrétienne sent bien que la simple abstention n’est pas suffisante, qu’elle est une lâche neutralité dans cette grande bataille plus ou moins inconsciente : que se coucher à neuf heures du soir le samedi, quand d’autres vont s’abandonner aux plaisirs du monde jusqu’à deux ou trois heures du matin – même si ce sont des plaisirs moralement neutres ! – n’est pas une réponse adéquate.

Puisque le Christ est avec nous, qui sera contre nous ? L’évidente infériorité numérique des soldats du Christ sur le terrain de la nuit n’est nullement une raison pour le déserter, bien au contraire : il faut conquérir et occuper, surtout dans la plus grande adversité, brebis au milieu des loups. Ainsi, on a vu fleurir, non sans vraie joie, de nombreuses « veillées de prière » un peu partout, surtout les vendredi et samedi soir, qui sont, consciemment ou non, de vrais actes militants, au sens du combat défini dans la première moitié de cet article : que de bien est fait par le simple témoignage de ceux qui renoncent à « sortir » pour aller prier ! Mais pour soumettre la nuit au Christ et en extirper l’influence du mal, il est une arme malheureusement bien négligée : l’Office nocturne.

Il ne s’agit pas d’une arme individuelle, mais bien plutôt d’un canon de gros calibre, du genre qui nécessite plusieurs servants : ces servants doivent être entraînés, et le terrain doit être préparé pour qu’on puisse l’employer ; mais une fois ces conditions réunies, cette arme est redoutable.

Il y faut donc une communauté (pas dans le sens monastique : un groupe d’amis, une paroisse, ou même une poignée d’inconnus font l’affaire : l’Office lui-même fera votre unité. Il est avantageux, mais nullement nécessaire, d’avoir sous la main un prêtre ou un diacre). Il y faut un lieu, un lieu consacré, place forte du camp du Christ, car on ne met pas un canon de gros calibre en première ligne, où il sera pris par l’ennemi, mais on le met derrière une fortification, c’est à dire une église ou un oratoire. Il y faut enfin du chant et le niveau adéquat de solennité dans les cérémonies ; ce qui suppose d’avoir de cet office une connaissance suffisante, donc d’y avoir été formé. Heureusement, les ressources à cet effet abondent, en particulier sur Internet.

L’Office de nuit s’appelle Vigiles dans la tradition bénédictine, Nocturnes dans les rites latins médiévaux, et Matines depuis quelques siècles ; ce nom est un accident de l’histoire, car il évoque le matin, alors qu’il s’agit bien d’un office pour la nuit noire. Lors de la réforme liturgique, il a été renommé Office des Lectures.

L’emploi de l’Office des Lectures selon la Liturgie des Heures réformée par saint Paul VI, en tant que moyen et signe de la conquête du Christ sur la nuit, pose trois problèmes majeurs : premièrement, il n’y a pas de partitions de chants pour le texte de cet office (plus précisément, seule une petite partie des partitions a été publiée) ; deuxièmement, il a été pensé par ses créateurs, à la fin des années 1960, principalement comme un office destiné à la récitation individuelle ; et troisièmement, l’extrême longueur de ses deux ou trois lectures le rend très indigeste, spécialement pour les fidèles laïcs qui participeraient à l’office. La Présentation générale de la Liturgie des Heures, §58, n’envisage que comme une exception (même « très louable ») son chant nocturne, à part dans les monastères.

L’office bénédictin appartient en propre aux bénédictins, même laïcs (tiers-ordre et oblats) ; c’est donc vers les Matines romaines que se tourneront ceux qui veulent combattre par ce moyen les ténèbres de la nuit.

Les Matines romaines comportent, pour la nuit du samedi au dimanche et les nuits précédant les fêtes, le chant du psaume 94, sur l’un ou l’autre d’une dizaine de tons ornés, qui sont parmi les plus anciennes pièces du chant grégorien, en alternance avec une antienne que l’on chante neuf fois au total ; une hymne ; puis trois nocturnes. Un nocturne est composé de trois psaumes et trois lectures chacune suivie d’un répons. Les lectures sont courtes, et les trois lectures d’un nocturne se suivent, de telle sorte que l’assemblage de ces trois lectures est un peu plus long qu’une lecture de la Messe, par exemple. Les répons insérés après chaque lecture sont de longs chants, que tous ceux qui les ont entendus s’accordent à considérer comme les joyaux du répertoire grégorien, plus beaux encore que les graduels et les offertoires de la Messe. Ils permettent à tous de méditer les quelques phrases de la lecture que l’on vient d’entendre, et d’en faciliter la mémorisation.

Au premier nocturne, les trois lectures sont tirées de la Bible, généralement de l’Ancien Testament ; au deuxième nocturne, on lit un commentaire du passage biblique du premier nocturne, par un Père de l’Église, la nuit précédant les dimanches ; la nuit précédant les fêtes, on lit au deuxième nocturne la vie du saint du jour. Le troisième nocturne est consacré à un commentaire de l’Évangile de la Messe du jour.

Sauf aux dimanches de l’Avent et du Carême, la neuvième lecture est suivie, non d’un répons, mais du chant du Te Deum, qui conclut l’office. L’auteur de ces lignes a eu l’occasion de le chanter en paroisse récemment, et de constater que ce chant si beau et si important dans les liturgies latines est très méconnu des fidèles : voici pour eux l’occasion de le réapprendre.

L’ensemble dure environ deux heures : c’est une durée à la mesure de celle de la nuit elle-même : le diable n’en est pas aisément chassé, et sa conquête est un exercice d’endurance dans la veille, « en attendant que se lève sur le monde le Soleil de Justice, le Christ, notre Dieu ». Ceux qui chantent les Matines témoignent des trésors incommunicables qu’il y ont trouvés : venez, et voyez.

Keur Moussa et l’inculturation du chant liturgique

Keur Moussa est une abbaye bénédictine fondée dans les années 60 à Keur Moussa dans l’Ouest du Sénégal qui compte aujourd’hui une trentaine de moines. L’abbaye est reconnue principalement pour son chant et sa musique liturgiques qui s’inscrivent profondément dans le principe d’inculturation et pour sa revitalisation d’un instrument de la culture mandingue, la kora.

Habituellement le terme d’inculturation désigne la transmission du message kérygmatique en fonction de la culture du pays (par exemple saint Paul à l’Aéropage) mais le terme est de plus en plus couramment utilisé de manière analogique pour désigner l’adaptation de l’expression rituelle de la Foi, la liturgie.

Ce principe d’inculturation du chant est explicitement cité ainsi : « 6. Le chant et la musique requis par la réforme liturgique – il est bon de le souligner – doivent également répondre aux exigences légitimes de l’adaptation et de l’inculturation. Il est toutefois clair que toute innovation dans cette matière délicate doit respecter des critères précis, tels que la recherche d’expressions musicales qui répondent au besoin d’impliquer l’assemblée tout entière dans la célébration et qui évitent, dans le même temps, de céder à la légèreté et à la superficialité. »

Pourquoi prendre Keur Moussa pour exemple ? parce que notre foi et notre rite romain ne connaissent pas de frontières et nous y trouvons un parfait et rare exemple d’adaptation du trésor liturgique à la culture environnante. Et la question que j’aimerais que nous nous posions : en quoi la musique de Keur Moussa est-elle plus liturgique et mieux inculturée que nos cantiques contemporains ?
eh bien j’y vois trois raisons:

Tout d’abord le texte, les chants de Keur Moussa repose sur les Saintes Écritures, comme le chant grégorien, le chant de cette abbaye ne s’éloigne pas de la parole de Dieu, il s’y attache et y trouve un ancrage pour sa composition, il tire des paroles évangéliques sa force mélodique.

Saint Jean Paul II dit à ce propos : « 3. En diverses occasions, j’ai moi-même rappelé la fonction précieuse et la grande importance de la musique et du chant pour une participation plus active et intense aux célébrations liturgiques, et j’ai souligné la nécessité de « purifier le culte d’erreurs de style, de formes d’expression médiocres, de musiques et de textes plats, peu adaptés à la grandeur de l’acte que l’on célèbre » , pour assurer la dignité et la beauté des formes de la musique liturgique. »

La deuxième raison est sa proximité avec la manière de chanter le grégorien dans une partie de ses compositions (Keur Moussa est une fille de Solesmes, rappelons-le) cela en conformité avec l’enseignement récent de l’Eglise sur la musique sacrée.

Et la dernière raison, sa stricte inculturation, la musique de l’abbaye n’use d’aucun artifice moderne ou occidental pour être jouée, vous n’entendrez aucun synthétiseur, aucune guitare, uniquement les instruments que l’on retrouve dans la musique traditionnelle sub-saharienne. Le mélange surprenant mais intelligent du chant avec une rythmique propre à la culture de l’Afrique de l’Ouest est réussi car il correspond à un mode d’expression soit solennel, soit joyeux ou contemplatif et permet réellement d’entrer dans une attitude de prière qui sied à la liturgie.

Voici quelques exemples concrets et en premier une pièce de l’ordinaire, un Agnus Dei en langue wolof dont voici les paroles:

Mburtum Yalla mi di dindi baakari adduna,
yërëm nu
Mburtum Yalla mi di dindi baakari adduna,
yërëm nu
Mburtum Yalla mi di dindi baakari adduna,
may nu jamm

Un deuxième exemple avec un accompagnement instrumental :

Et un dernier exemple avec un accompagnement à la kora :

Si vous désirez approfondir vos connaissances à ce sujet, voici un court article écrit par le Père Olivier-Marie SARR osb : https://www.academia.edu/

Fonction du Cérémoniaire à la messe chantée

On appelle couramment messe chantée, dans la forme extraordinaire du rite romain, une messe solennelle (avec encens) célébrée en l’absence du diacre et du sous-diacre. À l’origine, la messe chantée n’est qu’une messe basse qui n’est ni lue ni dialoguée, mais à laquelle on chante toutes les parties qui ne sont pas lue secrètement. Avec le temps, et grandement encouragée par les liturgistes des derniers siècles, est apparue la messe chantée avec encens.

Cette forme de messe, d’apparition relativement récente, est aujourd’hui la plus répandue, mais également celle où on observe le plus de changements d’une communauté à l’autre, d’un liturgiste à un autre. Cet article s’efforcera de donner les différentes variations de cette messe, selon les règles du Missel Romain de 1962.

Une messe chantée requiert la présence de quatre servants pour accompagner le prêtre : deux acolytes, un thuriféraire dont le rôle est de porter (fero en latin) l’encens (thuris), et un cérémoniaire, auquel ce premier article est directement consacré. Afin de solenniser certaines fête, et pour donner l’opportunité aux garçons de se rapprocher de l’autel, il existe d’autres fonctions qui peuvent être accomplies par des jeunes moins expérimentés, comme les céroféraires (au nombre de 2, 4, ou 6, parfois 8) et le porte-navette. Dans de nombreux lieux, on rajoute un porte-croix, qui se placera entre les deux acolytes lors de la procession d’entrée et de retour à la sacristie.

Le rôle du cérémoniaire est d’assurer l’exécution correcte et digne de la cérémonie ; il veillera donc à ce que les ministres accomplissent convenablement leur rôle, n’hésitant pas à les reprendre discrètement s’ils commettent des erreurs. C’est également à lui que revient la tâche de corriger le prêtre si celui-ci se trompe, et de lui indiquer ce qu’il doit faire si celui-ci a une hésitation. Il veillera de même à la cohésion des mouvements d’ensemble. Pour cela, il claquera des mains un coup à chaque fois que les ministres doivent génuflecter ou se lever, et deux coups pour s’agenouiller. Ce signal doit être assez fort pour être entendu de tous, tout en demeurant discret.

À la sacristie, le cérémoniaire aide le célébrant à revêtir les ornements. Il donne ensuite le signal du départ de la procession. Il marche devant le prêtre si celui-ci est en chasuble, ou à sa droite si celui-ci porte la chape. (c’est d’ailleurs la règle générale lorsque le cérémoniaire accompagne le célébrant). Il aide le prêtre à monter toutes les marches qu’il rencontre en soulevant le bas de l’aube. En entrant dans le cœur, il vient se placer à droite du prêtre au pied des marches, ou à gauche si on chante l’Asperges me. Durant l’aspersion, le cérémoniaire se place toujours à gauche du célébrant en passant toujours devant lui lorsqu’il doit échanger de côté avec le thuriféraire pour se retourner. Il est aspergé à genoux s’il est aspergé juste après l’autel, et debout profondément incliné s’il est aspergé après les fidèles. Lorsque le prêtre est de retour à l’autel après l’aspersion, le cérémoniaire lui présente la feuille pour l’oraison. Le cérémoniaire accompagne le célébrant à la banquette, lui ôte la chape qu’il donne au thuriféraire, et aide le prêtre à revêtir le manipule et la chasuble. Ils retournent alors tous les deux au pied de l’autel.

Le cérémoniaire fait la génuflexion en même temps que le prêtre et s’agenouille à la droite du prêtre, répondant aux prières au bas de l’autel. Après celles-ci, il fait lever tout le monde, et se rend à la gauche du thuriféraire, côté épître en bas des marches, qu’ils montent ensemble après avoir salué le prêtre une fois que le cérémoniaire a reçu la navette du thuriféraire. En haut du marchepied, le cérémoniaire ouvre la navette et donne la cuillère au prêtre (à chaque fois qu’il donne quelque chose au prêtre il embrasse d’abord l’objet puis la main du prêtre). Il demande ensuite au prêtre de bénir l’encens en disant la phrase suivante « Benedicite pater reverende » (bénissez, révérend père) ; lorsque le prêtre la lui rend, il récupère la cuillère (à chaque fois que le prêtre lui donne un objet, il embrasse d’abord la main, puis l’objet). Il rend ensuite la navette au thuriféraire, et celui-ci lui passe l’encensoir. Le cérémoniaire vient se placer à droite du prêtre et lui donne l’encensoir (avec baisements). Il accompagne les mouvements du prêtre, et lui soutient le coude en génuflectant. Si la forme de la chasuble gêne les mouvements du prêtre, il la soutient légèrement pendant l’encensement. L’autel encensé, il reçoit l’encensoir (avec baisements), descends in plano (i.e. en bas des marches) côté épître, se tourne vers le prêtre, et l’encense trois fois deux coups, s’inclinant profondément avant et après. Il rend alors l’encensoir au thuriféraire, et monte au côté épître de l’autel, « au missel », à droite du prêtre.

Le cérémoniaire indique au célébrant de la main droite l’antienne d’introït. Il se signe et s’incline avec lui au Gloria Patri, puis répond au Kyrie. S’il a le temps, il indique au prêtre de s’asseoir. Ils se rendent à la banquette par le chemin le plus bref, sans inclinaison ni génuflexion. Le cérémoniaire arrange la chasuble sur la banquette, à moins que la disposition des lieux rendent cette tache plus facile aux acolytes. Il donne la barrette au prêtre, puis il se place debout face aux fidèles, à la droite du célébrant, ce qui sera sa position habituelle lorsque celui-ci est à la banquette. Au dernier Kyrie, il fait, d’une inclinaison de tête, signe au prêtre de se découvrir et de se lever, et récupère la barrette, et l’accompagne à l’autel pour qu’il y arrive à temps pour le Gloria ou la collecte. Ils retournent à l’autel par le milieu, où le cérémoniaire fait la révérence appropriée à la Croix avec le célébrant avant que celui-ci ne monte à l’autel.

S’il y a un Gloria, le cérémoniaire vient ensuite se placer en bas des marches, légèrement sur la droite, face au troisième cierge. (Si le prêtre n’était pas allé s’asseoir, le cérémoniaire se tourne sur sa droite, puis il descend et fait le tour des marches pour venir à sa place) il fait les inclinaisons de tête vers la Croix pendant le Gloria (aux mots « Deo », « adoramus te », « gratias agimus tibi », « Jesu Christe », « suscipe deprecationem nostram » et « Jesu Christe »). Lorsque le prêtre a fini de réciter le Gloria, ils vont à la banquette, toujours par le chemin le plus court et sans génuflection ou inclinaison. Il fait à la croix d’autel les inclinations profondes qui conviennent pendant le chant du Gloria (en s’inclinant avant vers le prêtre pour qu’il se découvre). À la fin du Gloria, il fait le signe de croix et s’incline vers le prêtre, puis ils retournent à l’autel.

Le cérémoniaire monte au missel et indique au célébrant la collecte, et les éventuelles mémoires. À la fin de la dernière oraison, il descend à la crédence chercher le lectionnaire (si besoin), puis remonte au missel. Si le prêtre souhaite lire la traduction de l’épître à ce moment, le cérémoniaire lui donne le lectionnaire ouvert à la bonne page. Le prêtre récite ensuite le Graduel, l’Alléluia, l’éventuelle séquence ou le trait. Ils vont ensuite s’asseoir comme précédemment. Au début de l’Alléluia (lorsque la schola chante alléluia pour la deuxième fois) ou pendant la séquence ou le trait, il fait signe au prêtre de se lever et l’accompagne à l’autel. Arrivé au pied des marches, il aide le prêtre à les monter, puis appelle le thuriféraire pour imposer de l’encens (qui se déroule exactement comme la première). À la fin de l’imposition, le thuriféraire récupère la navette et garde l’encensoir. Le cérémoniaire prend le missel, et descend se placer au pied des marches à droite du thuriféraire. Lorsque la schola reprend « Alléluia » (ou à la fin de la séquence ou du trait), tous génuflectent au signal du cérémoniaire. Puis, le cérémoniaire monte poser le missel côté Évangile, et redescend à droite du thuriféraire.

Au Dominus vobiscum qui précède l’Évangile, le cérémoniaire récupère l’encensoir dans sa main droite, et monte le présenter au prêtre, avec baisements, pour l’encensement du missel. S’il y a une inclinaison à faire au début de l’Évangile, il attendra cette inclinaison pour redescendre des marches. Il rend ensuite l’encensoir au thuriféraire, et reste ici jusqu’à la fin de l’Évangile. Si le prêtre le lui tend, il récupère le lectionnaire qu’il va poser à la crédence lorsque tous ont fait la génuflexion au pied des marches à son signal.

Il est interdit d’encenser ici le célébrant à la messe chantée (cf Ritus Servandus, VI, 8) ; en effet, le diacre à la messe solennelle encense l’officiant (qui n’est d’ailleurs par toujours le célébrant, mais peut être un prélat assistant à la messe depuis son trône), pour lui rendre grâce de l’avoir missionné pour annoncer l’Évangile. Mais le célébrant qui proclame lui même l’Évangile ne doit pas s’encenser ou se faire lui même encenser, pour se rendre grâce à lui même.

Si le prêtre donne une homélie, le cérémoniaire va s’asseoir à côté de la banquette ou accompagne le prêtre à la chaire. S’il y a un Credo, il vient se placer in-plano face à l’autel, côté épître. Lorsque le prêtre a fini de réciter le Credo, ils vont à la banquette après avoir fait la révérence appropriée au milieu. Le cérémoniaire se met à genoux au chant du « et incarnatus est » si le prêtre a fini de réciter le Credo ; si le prêtre n’est pas encore assis, ils s’agenouillent au pied des marches, sinon, le cérémoniaire s’agenouille à côté de la banquette où le prêtre est assis, après lui avoir fait signe de lui-même s’incliner. Le célébrant assis, le cérémoniaire prend à la crédence le calice et l’apporte à l’autel ; il y déplie le corporal, pose le calice dessus, et rapproche le missel. Puis il retourne à la banquette. S’il n’est pas clerc, il prendra soin d’attraper le calice par le voile pour ne pas le toucher ; on pourra également, en ce cas, laisser le calice posé sur l’autel dès le début de la messe. À la fin du Credo, il fait signe au prêtre de se découvrir et de se lever, puis il l’accompagne à l’autel, où il monte par le milieu.

À l’Oremus de l’offertoire, le cérémoniaire apporte le calice s’il ne l’a pas encore fait (absence de Credo). Puis il plie le voile de calice que lui passe le célébrant, et redescend à sa place. Lorsque le prêtre s’incline sur les oblats (In spiritu humilitatis), le cérémoniaire appelle le thuriféraire pour l’imposition de l’encens, qui se déroule comme au Kyrie. Puis le cérémoniaire rend la navette au thuriféraire, et reçoit l’encensoir qu’il donne au prêtre avec les baisers. Il assiste ce dernier à sa droite pendant l’encensement, soutenant le coude à chaque génuflexion et la chasuble si nécessaire. À la fin de l’encensement de l’autel, le cérémoniaire reçoit du célébrant l’encensoir, descend in-plano, et l’encense de trois coups doubles, s’inclinant profondément avant et après. Ayant rendu l’encensoir au thuriféraire, le cérémoniaire fait le tour des marches, génuflecte au pied de l’autel et monte directement au missel.

Il répond à l’Orate fratres, indique la secrète et les éventuelles autres oraisons au célébrant, puis met le missel à la page de la préface. Le cérémoniaire se tourne vers le thuriféraire au moment opportun pour se faire encenser, le saluant avant et après d’une inclinaison de tête. Quand le célébrant achève la récitation du Sanctus, le cérémoniaire met le missel à la page du Canon.

Pendant le canon, le cérémoniaire reste au missel, tournant les pages quand il le faut. Au Memento des vivants, il se retire légèrement, et se rapproche quand le célébrant étend à nouveau les mains. Au « Quam oblationem », ou plus tard s’il lui faut encore tourner la page avant les paroles de la consécration, le cérémoniaire s’agenouille sur le marchepied. Il soulève légèrement la chasuble du célébrant à chaque élévation, et se relève avec lui après la dernière génuflexion. Il assiste de nouveau le célébrant au missel, tournant les pages quand il le faut. Lorsque le célébrant génuflecte, le cérémoniaire fait de même, soutenant légèrement le coude du célébrant. Au Memento des morts, il se retire comme pour le Memento des vivants. Il reste ainsi au missel jusqu’aux prières précédant la communion.

Au premier Domine, non sum dignus du célébrant, le cérémoniaire descend s’agenouiller in plano au côté Évangile, face à l’Orient. Il reste ainsi jusqu’à l’Indulgentiam qui suit le Confiteor (récité par le 1° acolyte). Quand le célébrant se retourne vers l’autel pour prendre le ciboire, le cérémoniaire et les autres ministres se lèvent. Tous se mettent en ligne au pied de l’autel. Ils génuflectent, montent et s’agenouillent sur le marchepied pour communier. Le cérémoniaire, qui est à l’extrémité côté Évangile, communie le dernier. Il garde le plateau avec lui, se lève et accompagne le célébrant pour la distribution de la communion. Celle-ci achevée, il précède le célébrant à l’autel, lui donne le plateau de communion, et s’agenouille au pied des marches, côté épître.

À la fermeture du tabernacle, il fait signe aux servants de se lever, puis il reste au pied des marches pendant les ablutions. Il monte au côté épître lorsque le 1° acolyte y a déposé le missel, et indique au célébrant l’antienne de communion quand celui-ci vient la réciter. Il reste au missel pendant le Dominus vobiscum puis indique la postcommunion et les éventuelles autres oraisons. L’oraison chantée, il ferme le missel (tranche vers la croix), prend le carton de l’Ite missa est si besoin, et descend par le côté épître le présenter au célébrant.

Quand celui-ci l’a chanté, il génuflecte au milieu et s’agenouille au pied de l’autel. Après avoir reçu la bénédiction, il monte au côté évangile de l’autel. Il est préférable que le cérémoniaire ne tienne pas le canon pendant le dernier évangile, cette fonction étant réservée au sous-diacre. Après avoir répondu Deo gratias, il vient prendre place au pied de l’autel, de telle sorte qu’il soit à la droite du célébrant pour la génuflexion finale. Il précède le célébrant à la sacristie, où il donne le signal du salut à la croix, salue l’évêque si celui-ci est présent, puis le célébrant et demande la bénédiction au plus digne en disant : « Jube domne benedicere« . Il aide enfin le célébrant à quitter les ornements.

Brève histoire du rite romain de la messe (Uwe Michael Lang) — Partie III : Le troisième siècle, entre croissance paisible et persécution

Suite de la traduction de la série d’articles du père Uwe Michael Lang, C.O., parue dans la revue liturgique Adoremus. On trouvera ici l’original.


Le statut des premiers chrétiens dans l’Empire romain était précaire et les fonctionnaires les considéraient souvent avec suspicion, mais les persécutions réelles étaient locales et sporadiques avant le milieu du troisième siècle. Les mesures brutales prises sous les empereurs Dèce en 250 et Valérien en 258 ont affecté les communautés chrétiennes dans tout l’Empire, mais elles ont été suivies d’une période de croissance pacifique, jusqu’à ce que, en 303, l’empereur Dioclétien déclenche la dernière persécution romaine des chrétiens avant la reconnaissance officielle du christianisme par Constantin en 313.

Des bâtiments d’église consacrés apparaissent dans la seconde moitié du troisième siècle. Eusèbe de Césarée parle de la construction de grandes « églises » – il utilise le terme spécifique – sur les fondations de bâtiments plus anciens qui étaient devenus trop petits pour les assemblées croissantes de chrétiens[1] . Eusèbe présente également la destruction d’églises comme une caractéristique de la persécution dioclétienne. Ces églises pré-constantiniennes pouvaient être pourvues d’objets précieux pour le culte, comme le montre le rapport d’une confiscation dans l’église de Cirta en Afrique du Nord daté du 19 mai 303.

Le lieu du culte

Les racines du culte chrétien primitif dans la liturgie du Temple remet en question l’idée reçue selon lequel l’Église primitive s’identifiait exclusivement comme un groupe eschatologique de croyants rejetant l’idée d’espace sacré et n’ayant nul besoin de de lieux spécifiquement dédiés au rituel et au culte. Dans une étude récente, Jenn Cianca soutient que les chrétiens se réunissaient par nécessité dans des lieux sacrés qui étaient temporaires, et non permanents, et qui se constituaient à travers des rituels, en particulier l’Eucharistie. En s’appuyant sur l’anthropologie sociale et l’étude des rites, Cianca propose la conception d’une sacralité construite rituellement, qui « permet un développement organique, plus lent, de l’espace sacré de l’espace sacré primitif, plutôt que d’interpréter la construction de la basilique Latran à Rome comme une révolution ». [2]

Cette nouvelle perspective éclaire également la question controversée de savoir si les références chrétiennes pré-constantiniennes au terme « autel » doivent être interprétées de manière métaphorique ou si elles désignent des objets matériels réellement utilisés dans le culte. D’un point de vue phénoménologique, les tables en bois destinées à l’eucharistie des premiers chrétiens étaient très différentes des autels en pierre associés à l’abattage des animaux dans le culte païen. Cependant, comme le montre Stefan Heid, la sacralité d’un autel ne dépendait pas de sa forme ou de son matériau, mais de sa fonction. Dans l’Antiquité classique, divers objets pouvaient servir d’autel pour les offrandes aux dieux, notamment des trépieds en métal, des piliers en pierre, des tables en bois et des autels massifs en pierre[3]. En outre, le fait qu’un objet ne soit pas fixe mais mobile ne le rendait pas profane. Dans ce contexte, une table en bois mobile, apportée dans un lieu de rencontre chrétien pour l’Eucharistie, pouvait quand même être considérée comme un autel et être chargée de caractère sacré. [4]

Le temps de prier

Lorsque nous en venons à considérer le jour et l’heure de la célébration de l’Eucharistie, l’importance du premier jour de la semaine juive est évidente dans le christianisme primitif. C’est le jour de la résurrection du Christ d’entre les morts (Marc 16:2 ; Jean 20:1, 19), et il est observé de manière spéciale par la communauté (1 Corinthiens 16:2 ; Actes 20:7-12). Le « Jour du Seigneur » (Apocalypse 1,10) est très probablement identifié au premier jour de la semaine, et ce jour-là, l’Eucharistie est célébrée (Didaché 14). L’épître de Barnabé a généralement été datée de 130-135, mais des études récentes ont encouragé une datation plus ancienne, vers 96-98. Dans cette lettre, que certaines Églises acceptaient comme faisant partie des Écritures canoniques, les chrétiens sont invités à célébrer non pas le sabbat, mais le premier jour de la semaine, qui est acclamé comme le « huitième jour, le commencement d’un autre monde ». Ce huitième jour marque une nouvelle création car c’est le jour de la résurrection de Jésus[5]. Au milieu du deuxième siècle, Justin Martyr explique également la signification particulière du « jour du soleil » pour la célébration de l’Eucharistie en se référant au début de la création de Dieu et à la résurrection du Christ[6].

Étant donné que le jour juif commence au coucher du soleil, la célébration hebdomadaire de l’Eucharistie a pu initialement avoir lieu le samedi soir après la fin du sabbat, comme le soutiennent de plus en plus de spécialistes. Au début du troisième siècle, cependant, Tertullien rapporte que le « sacrement de l’Eucharistie » ou le « sacrifice » à « l’autel de Dieu » est célébré le matin – vraisemblablement le dimanche[7]. Tertullien distingue clairement l’Eucharistie du « repas de Dieu  » ou du « banquet du Seigneur » convivial qui a lieu le soir[8]. Tertullien témoigne également de l’obligation de jeûner avant de recevoir l’Eucharistie, comme le fait la Tradition apostolique, ce qui indique une célébration matinale[9]. Au milieu du troisième siècle, Cyprien de Carthage confirme que l’Eucharistie, qu’il appelle dominicum (littéralement,  » ce qui appartient au Seigneur « ), est distincte du repas du soir et a lieu le matin en célébration de la résurrection du Seigneur[10].

Dans la plupart des traditions religieuses, la position adoptée dans la prière et l’aménagement des lieux saints sont déterminés par une « direction sacrée ».[11] À partir du deuxième siècle, prier face à l’Est est, pour les chrétiens, une évidence. La Didascalia Apostolorum , une ordonnance de l’Église syriaque du IVe siècle basée sur un original grec datant probablement du début du IIIe siècle, stipule que l’assemblée liturgique, clergé et laïcs, doit se tenir debout et se tourner vers l’Est pour prier[12]. Le verset du psaume invoqué pour authentifier cette règle, « Rendez gloire à Dieu, qui monte sur le ciel des cieux, vers l’Orient  » (Psaume 67 [68], 34), est compris comme une prophétie de l’Ascension du Seigneur. Le Christ est monté vers l’Est, le lieu du Paradis (Genèse 2:8), d’où l’on attend sa seconde venue. Un large courant de sources liturgiques à partir du quatrième siècle confirme la pratique de la prière face à l’Est. L’élévation des cœurs qui introduit la prière eucharistique (Sursum cordaHabemus ad Dominum) était accompagnée de gestes de prière de toute l’assemblée : se tenir debout, lever les bras, regarder vers le ciel et se tourner vers l’Est[13].

Théologie des azymes

Les œuvres d’auteurs chrétiens de différentes régions de la fin du IIe et du début du IIIe siècle, parmi lesquels Irénée de Lyon (m. 202), né en Asie Mineure, Clément (m. c. 215) et Origène d’Alexandrie (m. 253), Tertullien (m. après 220) et Cyprien de Carthage (m. 258), offrent de riches contributions à une théologie de l’Eucharistie. Leurs diverses lignes de pensée convergent vers une compréhension claire du caractère sacrificiel de l’Eucharistie et un sens réaliste de la présence du Christ dans les offrandes consacrées et des effets salvateurs qu’elles confèrent à ceux qui les reçoivent dans la foi. Ils témoignent également de la grande révérence avec laquelle les chrétiens considéraient le corps et le sang du Christ. La très influente Lettre 63 de Cyprien présente un intérêt particulier, car il s’y oppose aux groupes qui utilisent de l’eau à la place du vin pour l’Eucharistie – une pratique connue par les Actes de Thomas en Syrie et d’autres apocryphes du Nouveau Testament.

Cyprien élabore une théologie de l’Eucharistie comme offrande d’un sacrifice non sanglant en souvenir de la Passion du Christ. Dans le sacrifice de l’Église, le Christ, Grand Prêtre de la Nouvelle Alliance, s’offre lui-même, et le prêtre ordonné agit en la personne du Christ en imitant ce qu’il a fait lors de la dernière Cène[14]. Cyprien commente la connotation sacrificielle du vin dans les prophéties de l’Ancien Testament et soutient que son utilisation est inséparable du mémorial liturgique de la Passion du Christ. De plus, rejeter sa consommation dans l’Eucharistie est infidèle à la tradition de la Cène. Pour étayer son argument, Cyprien cite les paroles d’institution de Matthieu 26 et de 1 Corinthiens 11[15].


Pour les volets précédents de la série « Brève histoire du rite romain de la messe » du père Lang, voir la première et la deuxième partie.


Notes:

  1. Eusèbe de Césarée, Histoire Ecclésiastique, VIII,1,5. 
  2. Jenn Cianca, Sacred Ritual, Profane Space: The Roman House as Early Christian Meeting Place, Studies in Christianity and Judaism 1 (Montreal & Kingston: McGill-Queen’s University Press, 2018), 167. Un raisonnement similaire se trouve chez Ann Marie Yasin, Saints and Church Spaces in the Late Antique Mediterranean: Architecture, Cult, and Community, Greek Culture in the Roman World (Cambridge: Cambridge University Press, 2009), 44. 
  3. Voir Stefan Heid, Altar und Kirche: Prinzipien christlicher Liturgie (Regensburg: Schnell & Steiner, 2019), 54-67. 
  4. Voir ibid., 149-157. 
  5. Épître de Barnabé, 15,8-9. 
  6. Justin Martyr, Première Apologie, 67,8. 
  7. Tertullien, De corona, 3,3, et De oratione, 19,1-3. 
  8. Tertullien, Ad uxorem, 2,8,8; Apologeticum, 39,16-17; De spectaculis, 13,4. 
  9. Tertullien, Ad uxorem, 2,5,3; Tradition Apostolique, 36. 
  10. Cyprian de Carthage, Ep. 63,16,4. 
  11. Voir Uwe Michael Lang, Turning Towards the Lord: Orientation in Liturgical Prayer, 2nd ed. (San Francisco: Ignatius Press, 2009), 35-71. Traduction française : Se tourner vers le Seigneur, Ad Solem, 2006.
  12. Didascalia apostolorum, 12. 
  13. Voir Robert F. Taft, “The Dialogue before the Anaphora in the Byzantine Eucharistic Liturgy. II: The Sursum corda”, dans Orientalia Christiana Periodica 54 (1988), 47-77, at 74-75. 
  14. Cyprian de Carthage, Ep. 63, 14 et 17. 
  15. Ibid., 9-10. 

Brève histoire du rite romain de la messe (Uwe Michael Lang) — partie II : Questions dans la quête des origines de l’Eucharistie

Suite de la traduction de la série d’articles du père Uwe Michael Lang, C.O., parue dans la revue liturgique Adoremus. On trouvera ici l’original.


Dans l’une de ses lettres, Érasme de Rotterdam (mort en 1536) étayait le grand projet de l’humanisme de la Renaissance de revenir aux sources (ad fontes) en affirmant :  » C’est aux sources mêmes que l’on extrait la doctrine pure « [1] Au XIXe siècle, conscient de l’histoire, saint John Henry Newman (mort en 1890) illustrait sa théorie du développement de la doctrine (et du culte) par une image étonnamment différente : « On dit en effet parfois que le ruisseau est plus clair près de la source. Quel que soit l’usage que l’on puisse faire de cette image, elle ne s’applique pas à l’histoire d’une philosophie ou d’une croyance, qui au contraire est plus équilibrée, plus pure et plus forte, lorsque son lit est devenu profond, large et plein »[2].

La recherche des origines de la liturgie chrétienne donne certainement raison à Newman plutôt qu’à Érasme. Les sources qui sont parvenues jusqu’à nous sont peu nombreuses et la mesure dans laquelle elles représentent un christianisme normatif est contestée. De plus, comme l’a fait remarquer Joseph Ratzinger (Benoît XVI), « la Cène est le fondement du contenu dogmatique de l’Eucharistie chrétienne, et non de sa forme liturgique. Cette dernière n’existe pas encore »[3]. Cette forme liturgique a été façonnée par la tradition apostolique, qui s’est d’abord transmise non pas en référence à des textes écrits (les livres étaient des biens de luxe auxquels peu avaient accès) mais dans la fidélité à l’enseignement oral, avec un rôle particulier pour la mémorisation. L’apôtre Paul offre un exemple de ce processus : il avait déjà instruit la communauté chrétienne de Corinthe sur la Cène du Seigneur lors de son long séjour dans la ville. Par écrit, il n’aborde que les problèmes spécifiques qui se sont posés et ne répète pas l’ensemble de son enseignement. En fait, il préfère résoudre les problèmes en personne (1 Corinthiens 11:34). Des auteurs paléochrétiens, tels que Tertullien (mort après 220), saint Cyprien de Carthage (mort en 258) et saint Basile de Césarée (mort en 379) confirment l’importance des pratiques liturgiques et dévotionnelles non écrites[4].

Les défis de l’histoire

La nature même de la tradition orale fait échouer l’effort de reconstruction de l’historien ; c’est pourquoi notre connaissance de la pratique liturgique dans la période la plus ancienne est très limitée et la plupart des recherches dans ce domaine sont hypothétiques. La « fraction du pain », que les Actes des Apôtres présentent comme « une célébration eucharistique et une participation proleptique au banquet messianique »[5], se déroule « à la maison » (Ac 2,45 et 5,42). On en conclut souvent que l’Eucharistie était à l’origine célébrée dans un cadre domestique, qui pouvait aller des maisons de ville (domus) et des propriétés de campagne des classes supérieures aux appartements de différentes tailles, ainsi qu’aux magasins utilisés à des fins commerciales et résidentielles. Plus récemment, l’idée d' »églises de maison » dans le christianisme primitif a fait l’objet d’un examen approfondi, et les chercheurs ont plaidé en faveur d’un cadre plus formel et hiérarchique de la liturgie chrétienne primitive[6].

Un texte clé pour la compréhension chrétienne primitive de l’Eucharistie est Malachie 1:11 : « Du lever au coucher du soleil, mon nom est grand parmi les nations, et en tout lieu on offre de l’encens à mon nom, une offrande pure. » Sur fond de sacrifices souillés offerts par un sacerdoce corrompu, Dieu lui-même annonce, par son prophète, une  » offrande pure.  » Le mot hébreu utilisé ici est minhah, qui désigne l’offrande de repas non sanglante, typiquement un pain cuit et une libation de vin, qui accompagnait l’holocauste dans le Temple de Jérusalem (voir Nombres 15,4-5).

À partir de 1 Corinthiens 10, ce sacrifice à offrir « en tout lieu » (et pas seulement au Temple) a été identifié par les premiers chrétiens à l’Eucharistie[7]. Dans l’Antiquité, le sacrifice d’animaux et de produits de la terre était au cœur même du culte religieux, tant païen que juif (avant la destruction du Temple en 70 après J.-C.). Par les paroles et les actes du Christ, le concept de sacrifice n’est pas supprimé mais transformé. C’est pourquoi l’Eucharistie, tout en étant initialement liée au repas communautaire de l’église locale (comme le montre la Didaché, 9-10), était déjà considérée comme une action sacrificielle (Didaché, 14) au début du deuxième siècle, voire avant. Pour y participer, il fallait être baptisé et se repentir. Même dans les cadres modestes des deux premiers siècles, un lieu sacré (par nécessité temporel, non permanent) était constitué par et dans le rituel accompli par le corps des croyants.

L’Eucharistie et l’Église primitive

La description la plus ancienne de l’Eucharistie remonte au milieu du deuxième siècle à Rome, dans la première Apologie de saint Justin Martyr (mort vers 165), une défense de la foi et de la pratique chrétiennes adressée à l’empereur Antonin Pius. Justin donne d’abord un compte rendu de l’eucharistie post-baptismale, puis il esquisse une eucharistie dominicale typique. La Première Apologie est écrite pour un lectorat présumé païen et, par conséquent, seule la structure essentielle de la célébration est donnée dans un langage intelligible pour les étrangers ; aucune information détaillée n’est fournie sur sa forme rituelle ou le contenu des prières. Les éléments de base de l’eucharistie dominicale sont restés les mêmes au fil des siècles : lectures scripturaires ( » mémoires des apôtres  » – vraisemblablement les Évangiles –  » ou écrits des prophètes « ), prédication, préparation du pain et du vin mélangés à l’eau, prières de louange et d’action de grâce offertes par celui  » qui préside  » et conclues par un  » Amen  » de l’assemblée, communion partagée entre les personnes présentes et apportée par les diacres aux absents, et collecte finale pour les personnes dans le besoin[8].

Notamment, Justin souligne le caractère unique de l’Eucharistie par analogie avec l’Incarnation : tout comme le Christ  » a pris chair et sang pour notre salut « , le pain et le vin, qui ont été  » eucharistisés par une parole de prière qui vient de lui « , sont  » la chair et le sang de ce Jésus incarné « . Je considère que la « parole de prière » fait référence aux paroles de l’institution, que Justin cite ensuite sous la forme familière de Matthieu (26,26-28) et de Marc (14,22-24). Les offrandes eucharistiques transformées en chair et en sang du Christ – comme Ignace d’Antioche (vers 110), Justin préfère la terminologie johannique de « chair » (sarx) à « corps » (soma) – nourrissent « notre sang et notre chair ». L’accès à l’Eucharistie n’est pas indifférencié mais dépend de la foi, du baptême et de la conduite morale[9].

Premier texte source de la liturgie ?

Il existe un ordre ecclésiastique ancien, appelé « tradition apostolique », que les chercheurs du XXe siècle ont attribué à Hippolyte, un personnage assez haut en couleur de l’Église romaine qui a accusé son évêque Callistus (mort en 222) de laxisme dans la réconciliation des pécheurs et s’est érigé en premier antipape de l’histoire, mais qui a finalement été réconcilié et est mort martyr en 235. On pense qu’Hippolyte était un conservateur qui a compilé des informations importantes sur les pratiques liturgiques (peut-être même plus anciennes) de Rome. Cependant, des études récentes ont remis en question cette théorie concernant l’origine du document. Le document existant, originellement écrit en grec, sans titre, provient de l’Orient chrétien et n’a aucun lien avec Rome. Il n’a pas d’auteur unique, mais est une compilation de textes liturgiques qui étaient en usage et sujets à de fréquentes modifications. Il y a très probablement un noyau qui remonte au début du troisième siècle, auquel d’autres parties ont été ajoutées. Il existe une traduction latine dans un manuscrit du Ve siècle provenant de Vérone, ainsi que des versions dans des langues chrétiennes orientales.

Le texte a également influencé les ordres ultérieurs de l’Église en Orient (Constitutions apostoliques, livre VIII ; Canons d’Hippolyte ; Le Testament de Notre Seigneur Jésus-Christ). Aucun de ces ouvrages ne conserve l’intégralité du texte de ce qu’on appelle la Tradition apostolique, qui comprend : les rites d’ordination des évêques, des prêtres et des diacres ; les règlements sur les différents états de vie dans l’Église ; les rites du catéchuménat et du baptême ; diverses prières et bénédictions. Le rite d’ordination d’un évêque comprend le modèle très développé d’une prière eucharistique. Dans le Missale Romanum renouvelé de 1970, la prière eucharistique II suit le modèle « hippolytain » (bien qu’avec des modifications importantes). Bien que la Tradition apostolique contienne des éléments anciens, elle ne peut être utilisée comme source pour la liturgie romaine du début du IIIe siècle. Son influence sur le développement de la liturgie occidentale a été minime jusqu’aux réformes qui ont suivi Vatican II[10].


Notes

  1. Opus Epistolarum Des. Erasmi Roterodami, ed. Percy Scafford Allen, Hellen Mary Allen and Heathcote William Garrod, 12 vol. (Oxford: Clarendon Press, 1906-1958), vol. II, 284. 
  2. John Henry Newman, An Essay on the Development of Christian Doctrine, 14th impression (London: Longmans, Green, and Co., 1909), 40. 
  3. Joseph Ratzinger, “Form and Content of the Eucharistic Celebration”, in Theology of the Liturgy: The Sacramental Foundation of Christian Existence, Joseph Ratzinger Collected Works 11, ed. Michael J. Miller (San Francisco: Ignatius Press, 2014), 299-318, at 305 (originally published in 1978). 
  4. Tertullian, On the Crown, 3-4; Cyprian of Carthage, Letter 63, 1 and 11; Basil of Caesarea, On the Holy Spirit, 27, 65-66. 
  5. Scott Hahn, Kinship by Covenant: A Canonical Approach to the Fulfillment of God’s Saving Promises, The Anchor Yale Bible Reference Library (New Haven and London: Yale University Press, 2009), 234. 
  6. See Edward Adams, The Earliest Christian Meeting Places: Almost Exclusively Houses? (London: Bloomsbury, 2016), and Stefan Heid, Altar und Kirche: Prinzipien christlicher Liturgie (Regensburg: Schnell & Steiner, 2019), esp. 69-85. 
  7. See also Didache, 14; Justin Martyr, Dialogue with Trypho, 41; Irenaeus of Lyon, Against Heresies, IV.17-18, and many later references in the patristic tradition. 
  8. Justin Martyr, First Apology, 65 and 67. 
  9. Justin Martyr, 1 Apology, 66. 
  10. The ancient text was also used for the revision of the Rite of Ordination of a Bishop and for the restored Rite of Christian Initiation for Adults (RCIA). 

Rubriques de l’Ordo Cantus Missæ

Connaissez-vous l’Ordo Cantus Missæ ? C’est une partie méconnue du Missel Romain (de 1970 – 2002) qui donne la liste des chants à employer pendant la messe chantée pour chaque jour de l’année. La messe chantée (missa in cantu) définie et régulée par l’Ordo Cantus Missæ est une célébration intégralement chantée (où l’on chante, par exemple, les lectures, la prière universelle, la prière eucharistique, et tout le reste), qui ne doit pas être confondue avec la messe avec chants (missa cum cantu), qui est une messe lue à laquelle on ajoute des chants, et qui constitue la forme de célébration la plus répandue dans les paroisses. La messe chantée en forme ordinaire est rarement célébrée, mais le lecteur curieux pourra regarder cette vidéo :

L’Ordo Cantus Missæ comprend un avant-propos (Prænotanda) qui donne des rubriques pour la messe chantée. Nous devons à notre très estimé ami Jérémie Klinger cette traduction des rubriques de l’Ordo Cantus Missæ, dont nous croyons bon de rappeler qu’elles ont la même autorité que le missel lui-même et sa présentation générale.


Ordo Cantus Missæ

Prænotanda

1. De la mise à jour du graduel romain

Lors de la mise en place du calendrier général et des livres liturgiques, en particulier le missel et le lectionnaire, plusieurs changements et ajustements s’avérèrent nécessaires dans le Graduale Romanum. La suppression de plusieurs célébrations au cours de l’année liturgique comme le temps de la Septuagésime, l’octave de Pentecôte ou encore les Quatre-Temps et les messes qui les accompagnaient, tout comme le transfert de certaines fêtes de saints à des dates plus opportunes rendirent certaines adaptations nécessaires. Inversement, des chants propres devaient être donnés aux nouvelles messes et le nouvel arrangement du lectionnaire rendait nécessaire le fait que de nombreux textes, en particulier les antiennes de communion qui étaient reliées aux anciennes lectures, soient transférées à d’autres jours.

Ainsi, on a donné au Graduel Romain une nouvelle organisation, en gardant toujours en tête le §114 de la constitution Sacrosanctum Concilium qui énonce en particulier : « Le trésor de la musique sacrée sera conservé et cultivé avec la plus grande sollicitude. » L’authentique répertoire grégorien n’a souffert d’aucun détriment : au contraire, il a été renouvelé de diverses manières : les compositions jugées tardives sont mises de côté ; les textes les plus anciens sont utilisés avec un meilleur effet, et certaines nouvelles rubriques facilitent un usage plus large et plus varié du répertoire.

Le premier prérequis consiste en la préservation de l’intégrité de l’authentique trésor grégorien. Ainsi, les chants appartenant à des messes qui jusqu’à maintenant n’avaient pas leur place dans l’année liturgique ont été utilisés pour former d’autres messes (par exemple les féries de l’Avent et les féries entre l’Ascension et la Pentecôte). D’autres ont permis de substituer des chants revenant souvent au cours de l’année (par exemple durant le Carême ou les Dimanches du Temps ordinaire). D’autres enfin, selon leur caractère, ont été assignés à des fêtes de saints.

Près de vingt pièces grégoriennes authentiques qui, en raison de changements variés, n’étaient plus utilisées ont également été restaurées. Il a été décidé qu’aucune pièce authentique ne pourrait être rejetée ou mutilée, à l’exception de certains éléments jugés inappropriés pour le temps liturgique comme par exemple l’usage du mot Alleluia qui parfois se rencontre dans le texte d’une antienne en formant partie intégrante de la mélodie.

En mettant à part les compositions néo-grégoriennes tardives, en particulier celles composées pour les fêtes de saints, seules les mélodies grégoriennes authentiques ont été retenues, bien qu’il soit toujours permis pour ceux qui le préféreraient, de chanter ces compositions néo-grégoriennes puisqu’aucune d’entre-elles n’a été supprimée du Graduale Romanum. En effet, dans le cas où elles ont acquis un usage universel (solennité du Sacré Cœur, fête du Christ-Roi, Immaculée Conception de la B.V.M.), aucune substitution n’a été faite. Toutefois, dans d’autres cas, un nouveau corpus de chants a été choisi à partir du répertoire authentique, tout en essayant de conserver les mêmes textes dans la mesure du possible.

Finalement, après avoir mis de côté les mélodies non authentiques, nous avons pris soin de mettre en ordre les chants authentiques de manière plus appropriée en évitant les répétitions trop nombreuses et en donnant la part belle à d’autres mélodies de la plus grande qualité qui n’apparaissaient qu’une fois dans l’année. Un grand soin a été pris dans l’enrichissement des communs en leur assignant des chants qui ne sont pas strictement propres à un saint en particulier et qui peuvent ainsi être utiles pour tous les saints du même ordre. Les communs ont également été enrichis par des chants issus du propre du temps qui étaient rarement utilisés. Les rubriques permettent une plus grande facilité de choix des chants dans les nouveaux communs, ce qui permet de satisfaire les besoins pastoraux plus largement.

De la même manière, il est donné une certaine liberté de choix pour le Propre du Temps : il est permis de substituer à un texte propre au jour quelque autre texte du même temps liturgique, si on le juge opportun.

Les règles de la messe chantée telles qu’énoncées au début du Graduale Romanum de 1908 ont été ainsi réexaminées et modifiées, afin que la fonction de chaque chant apparaisse plus clairement.

2. Des rites devant être observés lors d’une messe chantée

1. Après que les fidèles se soient rassemblés et pendant que le prêtre et les ministres se rendent à l’autel, on commence l’antienne d’introït. Son intonation peut être raccourcie ou prolongée ou, mieux encore, le chant peut être immédiatement entonné par tout le chœur. Dans ce cas, l’astérisque qui indique dans le Graduel la partie réservée au chantre, doit être considérée comme un signe simplement indicatif.

L’antienne est chantée par le chœur, le verset par un ou plusieurs chantres, puis l’antienne est reprise par le chœur.

L’antienne et les versets peuvent être alternés de cette manière autant de fois que nécessaire pour accompagner la procession. Avant la dernière répétition de l’antienne, le Gloria Patri peut être chanté en guise de dernier verset. Si toutefois la mélodie du Gloria Patri possède une terminaison particulière, cette terminaison doit être utilisée pour chaque verset.

Si la répétition du Gloria Patri et de l’antienne prolonge excessivement le chant, on omettra la doxologie. Si la procession est particulièrement courte, on ajoutera un seul verset, ou bien même on chantera l’antienne seule sans ajouter de verset.

Lorsqu’une procession liturgique précède la messe, l’antienne d’introït est chantée au moment où la procession pénètre dans l’église, ou bien elle est omise, comme indiqué dans les livres liturgiques dans des cas spécifiques.

2. L’acclamation Kyrie eleison peut être partagée entre deux ou trois chantres ou chœurs, selon l’opportunité. Chaque acclamation est normalement chantée deux fois, ce qui n’exclut toutefois pas un plus grand nombre, en particulier suivant la structure musicale de chaque pièce, comme indiqué ci-dessous au numéro 491.
[NDT : le numéro 491 est dans le corps de l’OCM ; voir la fin de cet article.]

Lorsque le Kyrie est chanté pendant l’acte pénitentiel, on chante un court trope avant chaque acclamation.

3. L’hymne Gloria in excelsis est entonnée par le prêtre ou, si nécessaire, par le chantre. Elle est reprise alternativement par les chantres et le chœur ou par deux chœurs. La division des versets, indiquée par une double barre dans le Graduale Romanum peut ne pas être respectée si l’on trouve une méthode plus appropriée suivant la mélodie.

Quand, le dimanche, on emploie le rite de bénédiction et d’aspersion de l’eau bénite, ce rite tient lieu d’acte pénitentiel.

4. Lorsqu’il y a deux lectures avant l’évangile, la première, qui est habituellement tirée de l’Ancien Testament, est chantée sur le ton des leçons ou des prophéties et se termine par la formule habituelle pour un point final. La conclusion, Verbum Domini, est chantée avec la même formule que pour un point final et la réponse Deo gratias est chantée par tous en suivant la forme habituellement utilisée pour la conclusion des leçons.

5. Le répons graduel est chanté après la première lecture par des chantres ou par le chœur, mais le verset est chanté jusqu’à la fin uniquement par les chantres. Ainsi, on ne tiendra pas compte de l’astérisque indiquant une reprise du chant par le chœur à la fin du verset du graduel ou de l’alléluia, ou bien du dernier verset du trait. Lorsque cela semble opportun, la première partie du répons peut être reprise jusqu’au verset.

Durant le temps pascal, le répons graduel est omis et l’alléluia est chanté tel que décrit ci-dessous.

6. La seconde lecture, tirée du Nouveau Testament, est chantée sur le ton de l’épître avec sa propre formule de terminaison propre. Elle peut également être chantée sur le ton de la première lecture. La conclusion, Verbum Domini, est chantée suivant la mélodie donnée dans les tons communs, à laquelle tout le monde répond Deo gratias.

7. L’alléluia ou le trait suivent la seconde lecture. L’alléluia est chanté de la manière suivante : la mélodie complète est chantée par les chantres puis reprise ensuite par le chœur. Cependant, elle peut, si nécessaire, être chantée une unique fois par tous. Le verset est ensuite chanté jusqu’à la fin par les chantres, puis l’alléluia est repris par tous.

Durant le Carême, on chante le trait à la place de l’alléluia, dont les versets sont alternés entre les deux parties du chœur qui se répondent, ou bien alternativement entre les chantres et le chœur. Le dernier verset peut être chanté par tous.

8. Si l’on doit chanter la séquence, elle est chantée après le dernier alléluia alternativement par les chantres et le chœur ou par les deux parties du chœur. Le Amen final est omis. Si l’alléluia et son verset ne sont pas chantés, la séquence est omise.

9. S’il y a une seule lecture avant l’évangile, on chante le répons graduel ou l’alléluia et son verset. Durant le temps pascal, l’un ou l’autre des alléluia peuvent être choisis.

10. Après la formule de conclusion propre de l’évangile, on ajoute Verbum Domini selon la mélodie donnée dans les tons communs et tout le monde répond Laus tibi, Christe.

11. Le Credo peut être chanté par tous, ou en alternance selon la coutume.

12. La prière universelle se fait selon la coutume locale.

13. Après l’antienne d’offertoire, des versets peuvent être chantés, selon la tradition, mais ils peuvent toujours être omis, même dans l’antienne Domine Jesu Christe de la messe des morts. Après chaque verset, l’antienne ou une partie de celle-ci est reprise selon la manière indiquée.

14. Après la préface, tous chantent le Sanctus. Après la consécration, tous chantent l’acclamation d’anamnèse.

15. À la conclusion de la doxologie de la prière eucharistique, tous acclament : Amen. Ensuite, le prêtre seul entonne l’invitation à l’oraison dominicale que tous chantent avec lui. Ce dernier chante seul l’embolisme et tous le rejoignent pour la doxologie conclusive.

16. Durant la fraction du pain et la commixtion, on chante l’invocation Agnus Dei, entonnée par les chantres et poursuivie par tous. Cette invocation peut être répétée autant de fois que nécessaire tant que la fraction du pain se poursuit, tout en gardant à l’esprit sa forme musicale. L’invocation finale se conclut par dona nobis pacem.

17. On entonne l’antienne de communion lorsque le prêtre communie au Corps du Seigneur. Elle est chantée de la même manière que l’antienne d’introït, mais de telle sorte que les chanteurs puissent recevoir commodément ce sacrement.

18. Après la bénédiction du prêtre, le diacre chante la monition Ite, missa est et tous acclament : Deo gratias.

3. De la manière d’utiliser l’Ordo Cantus Missæ

19. Étant donnée la grande variété de lectures introduites dans le nouveau Missel et le fait que les chants de la messe issus de la tradition ne pouvant être changés, les chants ont été disposés en accord avec les différentes lectures du cycle triennal (années A, B, C) du lectionnaire dominical.

Pour les féries, les chants du dimanche précédent sont repris, avec des modifications pour les accorder avec les lectures assignées à chaque férie de l’Avent, du Carême et du Temps pascal, et avec la première lecture des féries du temps ordinaire, suivant le cycle biennal.

Si un chant paraît être relié de manière plus ou moins forte à certaines lectures, il peut être conservé avec elles au cas où ces dernières viendraient à être transférées.

20. Les variations pouvant intervenir dans le propre du temps sont indiquées dans cet Ordo, après chaque formulaire, par les abréviations suivantes :
– A,B,C pour les dimanches, solennités et certaines fêtes ;
– I et II avec le numéro de la férie (le samedi étant désigné par le numéro 7) pour les féries du temps ordinaire ;
– le numéro de la férie pour les féries des temps privilégiés.

21. La norme principale que cet Ordo Cantus Missæ s’attache à suivre est de respecter le plus possible l’ordonnancement du Missale Romanum. Pour cette raison, certains formulaires de chants ont été transférés ou altérés.

Des psaumes de communion

22. Les numéros des psaumes et leurs versets ont été notés d’après la Nova Vulgata, (Typis Polyglottis Vaticanis, 1969). Leurs versets et parties sont arrangés selon la Liturgia Horarum (Typis Polyglottis Vaticanis, 1971).

23. Une astérisque placée après le numéro d’un psaume indique que l’antienne n’est pas tirée du psautier et que ce psaume lui a été assigné ad libitum.

Dans ce cas, un autre psaume peut lui être substitué, si on le préfère, comme par exemple le psaume 33 qui était utilisé à la communion dans la tradition antique.

Lorsque le psaume 33 est indiqué comme psaume de communion, il n’y a pas de préférence parmi les versets à chanter dans ce psaume.


De l’emploi du Kyriale Romanum

[NDT : nous traduisons ici le n°491 de l’OCM, qui est en relation avec son n°2, ci-dessus.]

  1. Pour les chants de l’Ordo Missæ, on emploiera le Kyriale Romanum ou le Kyriale Simplex.
    On peut sélectionner les chants en fonction du talent ou des capacités des chanteurs, en employant des mélodies plus ornées aux célébrations plus solennelles.
  2. Quand le Kyrie est noté in extenso avec neuf invocations, sa forme musicale exige qu’on les chante en entier. Par contre, quand les premières invocations Kyrie sont identiques, on ne les chante que deux fois, et de même pour les invocations Christe et de nouveau Kyrie (p.ex. le Kyrie V). Quand la dernière invocation Kyrie a une mélodie particulière, l’invocation Kyrie qui la précède n’est chantée qu’une fois (p.ex. le Kyrie I).
    En règle générale on sera attentif à conserver les répétitions des invocations.
  3. Quand le Kyrie est utilisé comme réponse à une série d’invocations dans l’acte pénitentiel, on choisira une mélodie convenable, à savoir le Kyrie XVI ou XVIII du Kyriale Romanum, ou l’un de ceux du Kyriale Simplex.
  4. Quand, à la Messe dominicale, on emploie le rite de bénédiction et d’aspersion de l’eau bénite à la place de l’acte pénitentiel, on chante l’antienne Asperges me ou, au temps pascal, Vidi aquam.

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